Ce post fait suite à The Battle over Content que je publiais il y a un an. Pour résumer j'écrivais pour répondre à Tristan Nitot qui s'offusquait du fait que des blogs populaires se laissent tenter à faire du publi-rédactionnels, ce qui dénature complètement l'esprit du web. En particulier c'est un argument pour dire, au pire avec ce vieux débris de Séguéla, que le web est un immense bordel où règne les pires rumeurs, où se montent les pires calomnies, mais aussi dans le meilleur des cas c'est tout simplement un argument pour dire que les blogueurs et les infos tirées du web ne valent rien par rapport à de bons journalistes qui connaissent très bien leur métier.
Et qui travaillent sous les ordres de Dassault au Figaro, ou de manière plus générale dans un canard largement dépendant de ses rentrées publicitaires ou des exclusivités accordées ? Qui fait du journalisme d'investigation en France à part le Canard Enchaîné qui justement n'est pas financé par de la publicité ? Personne. Et il faut chercher sur le web pour trouver justement de nouvelles manières de faire du journalisme plus près des gens et moins proche du pouvoir (de l'argent, du politique) avec par exemple Rue89 ou Bakchich.info (en espérant que ce dernier survive malgré le positionnement sur le créneau des hebdos satiriques du mercredi).
Face à l'offensive des programmes TV gratuits Télé 7 jours, autrefois la référence dans les chaumières, est à la ramasse. Pas grave, ça n'a jamais été du journalisme (pas plus que les interviews de Drucker en tout cas) et il y a Télérama pour remonter le niveau chez les gens plus exigeants, mieux éduqués, et blablabla. J'ai toutefois arrêté de le lire régulièrement : d'une part parce que ça fait 15 ans que je n'ai plus la télé, mais surtout parce que j'y ai noté une forte surcharge publicitaire après le virage du rachat par le groupe La Vie-Le Monde. Condition à sa survie et à la préservation de son identité nationale nous expliquait-on.
J'ouvre la semaine dernière le Télérama n°3121 qui fait sa couverture sur un dossier "La télévision numérique mode d'emploi, 52 pages de conseils". Le reportage sur La presse italienne contre Berlusconi et le portrait de Patrick Buisson ne font l'objet que d'une mention, mais je ne remarque pas ça sur le coup : malgré mon esprit critique acéré mon premier regard ne s'occupe heureusement pas de juger a priori. En y réfléchissant ce dossier, pas du tout de fond, aurait plus sa place chez 60 millions de consommateurs par exemple. Mais il ne s'agit pas non plus de tests, de critiques du matériel pour regarder la télé en 2010. A feuilleter les 52 pages on y voit surtout une sorte de catalogue Fnac destiné à faire rêver les CSP+ à l'approche des fêtes. Tout ça, encore une fois, c'est mon esprit critique a posteriori qui le me le fait dire. Le déclencheur c'est cette pub dans le numéro suivant (3122): double-page sur le téléviseur Philips Cinema 21:9 (pages 9-10). En y regardant de plus près il y a déjà une pub pour cet TV (et une autre) en page 2 du dossier ! C'est vrai que pour fourguer un écran cinémascope à 4000€ il faut mettre le paquet pour toucher les CSP++ et leur remettre le produit sous le nez pour faire monter le désir. Il ne doit pas y avoir beaucoup de fétichistes du Cinémascope (en fait 2.35 c'est le ratio du format de référence Panavision nous apprend au moins Télérama) donc il faut susciter l'achat d'impulsion, vite !
Bref, tout ça pour dire que l'argument de dire que le seul journalisme qui compte dans une démocratie c'est le journalisme papier, c'est du pipo. Le journalisme papier a beaucoup de leçons à tirer de ce qui se passe sur internet, comme les maisons de disques et les distributeur et éditeurs de contenu ciné. Le journaliste papier doit vendre du papier, ce n'est pas un service public (et heureusement question indépendance du pouvoir), et pour mériter son salaire la jalousie de ses confrères (pour une exclu obtenue) est plus importante que l'admiration.
A suivre : une petite analyse du poids de la pub dans Télérama.
1 commentaire:
Le problème, c'est que les blogs n'ont pas de séparation entre le rédactionnel et la pub, alors que les journalistes, oui (du moins en théorie). Que ces journalistes publient sur Internet ou sur le papier n'a finalement aucune importance. Ce qui est important, c'est la neutralité de l'information.
C'est bien pour cela que le publi-rédactionnel non déclaré comme tel est passible de 37500 EUR d'amende et 2 ans de prison : http://decryptages.wordpress.com/2009/10/06/pub-cachee-sur-un-blog-jusqua-11-000-damende/ .
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