lundi 1 mai 2006

Fincher Price

Ne convient pas à un cinéphile de plus de trente-six mois.
Chapitre 1 : je n'ai pas revu Se7en depuis sa sortie. Je pense qu'une grosse partie de son succès est due au shock factor, l'accumulation de vignettes toutes plus malsaines les unes que les autres mais joliement emballées par la photo de Darius Khondji. Je soupçonne qu'en le revoyant je trouverais ça too much, trop de complaisance esthétique dans le sordide. En tout cas sans a priori je me souviens que Brad Pitt était très moyen dans un rôle de petit jeune flic très caricatural : la scène censée creuser le personnage était plombée par une Gwineth Paltrow déjà très mauvaise. Morgan Freeman était bien dans son rôle, un rôle qui n'avait rien de génial non plus.
Si je le revois un jour faudra que je m'intéresse à comment la tension narrative est construite avec cette escalade dans le malsain alors qu'on ne se rapproche du serial killer, John Doe, qu'à l'occasion d'une scène de poursuite très forte je dois l'avouer. Déjà Fincher a recours à un double retournement final : est-il possible que le spectateur soit toujours dupe d'un aussi gros artifice la deuxième fois ?

Chapitre 2 : Fight Club. Pas revu depuis sa sortie non plus, mais au contraire de Se7en très mauvaise impression en sortant. Cette fois Fincher ne m'a pas bluffé plus d'une petite demi-heure, soit en gros le temps de l'introduction du personnage principal joué par Edward Norton et avant le grand guignol qui ne fait que commencer avec l'arrivée de Tyler Durden (Brad Pitt). En gros, pour moi, Fincher n'a rien compris au bouquin original et a balancé à l'écran un baveux pensum anarcho-nihilisto-bobo. Ok ça fait beaucoup trop de mots pour caractériser ce truc qui n'est en fait, comme tous les Fincher, qu'un gros film boursoufflé, pris dans sa prétention autant visuelle que narrative.

Chapitre 3 : Panic Room. Vu à sa sortie, sorte de dernière chance accordé à ce réal qui m'énerve alors d'autant plus qu'il est adulé par la masse dont la cinéphilie repose sur la lecture de torchons publi-rédactionnels comme Première ou Studio. Panic Room ça ressemble à un petit exercice tranquille pour se faire comparer à Hitchcock. Tout éclate au grand jour dans ce film qui ne tient même pas la route l'espace d'une bobine. Le générique en images de synthèse sur les parois des buildings n'a aucun sens et ne fait que singer celui de Saul Bass pour La Mort aux Trousses (générique qui avait l'intérêt de plonger le spectateur dans l'esprit de la course poursuite qu'allait être le film). L'installation d'une jeune divorcée avec sa fille dans cette immense maison de New-York n'a aucun sens à part celui, artificiel, de faire mumuse avec des personnages sans défense dans un décor démesuré. Bien sûr les méchants sont assez mauvais pour être tenus en échec par deux femmes surprises en plein sommeil et les différentes péripéties sont toutes du même tonneau que cette ineptie révélatrice. Mais s'il ne devait rester qu'une image, emblématique de l'esbrouffe totale, c'est ce plan CGI (images de synthèse qui ont donc dû coûter cher) de la caméra qui se balade dans la maison endormie juste avant l'arrivée des intrus. Et là, sans aucune raison, on passe par l'anse d'une cafetière. Une complication sans intérêt d'une point de vue narratif et qui au contraire détruit toute la logique et tout le suspense d'un vaste mouvement de caméra déjà un peu trop grandiloquent au départ (le point de vue de la mouche avant le point de vue de la clé dans la serrure et finalement du gaz dans les tuyaux : quelle créativité débile pour tripoteur de pâte à modeler !).
Pour mémoire le plan de référence dans Frenzy est un modèle de construction spatiale du suspense par un mouvement de caméra qui isole les personnages dans le décor, qui dramatise l'action : le seul objectif est de mettre en scène la tension dramatique, pas de faire mumuse avec des images.

Chapitre 4 : The Game. Aïe. Je n'ai pas vu ce film à sa sortie mais je me souviens qu'il divisait les partisans subjugués et les autres qui trouvaient ça complètement pipo. J'ai téléchargé l'édition DVD Criterion du truc, je n'ai pas honte de le dire, j'ai déjà assez donné d'argent à ce réalisateur de mes deux. Mais avant de regarder le film il y a six mois j'avais oublié tout le passif de Fincher (c'est le seul avantage des mauvais films, ils sont oubliables) et j'étais prêt à être agréablement surpris. Ouais, difficile d'être surpris avec ce clipper qui ne sait que flatter l'oeil du spectateur et ajouter des 'twists and turns' pour faire tenir son histoire avec des grosses béquilles.
Qu'est-ce que The Game à part, une fois de plus, de l'esbrouffe totale ? Des personnages en deux dimensions, celles que leur confère le décor ? Fincher se croit malin en jouant au ping pong narratif : un élément réaliste brut, un élément de jeu malsain en contrepoint. J'ai du mal à croire que des spectateurs cultivés puissent être impressionnés par un travail aussi grossier et quand Ron parle de Chef d'oeuvre et compare ce machin à Hitchcock je suis estomaqué.

A part ça j'ai très peu de souvenirs d'Alien^3 : encore un film que je ne risque pas de revoir par plaisir de sitôt. Une note d'espoir : je doute que 10 ans après Se7en et 15 après Le Silence des Agneaux les gens aient envie de voir un film flashy sur un vrai serial killer tout ce qu'il y a de plus sordide (Zodiac).

2 commentaires:

Anonyme a dit…

hallucinant de prétention !

viktor a dit…

Ce Fincher, n'est-ce pas ?