jeudi 17 septembre 2009

Déjà vu : Out of the Past/Against All Odds

Out of the Past (La Griffe du passé - 1947), aussi connu sous le titre de Build my Gallows High (Pendez-moi haut et court), est tout simplement un des chefs d'oeuvre du film noir. L'idée d'en faire un remake est donc éminement foireuse d'entrée, et à plus forte raison s'il s'agit de faire le remake au coeur des années 80.

Notre petite jurisprudence D.O.A. nous montre en effet que les insouciantes, lumineuses et tape à l'oeil 80s sont tout ce qu'il y a de plus éloigné visuellement de l'époque des films noirs. Le contexte morose se prête pourtant aux histoires de héros poursuivis par la fatalité, mais en plus du manque d'un style propre après la fureur des années disco, de la libération sexuelle, les années 80 sont assommées par le retour des valeurs (morales) des années Reagan sur fond de crise économique permanente, au détriment du sens de la vie (c'est le travailler plus pour gagner plus avant l'heure). Ajoutons à ça que la "nouvelle vague US", les jeunes réalisateurs prometteurs des 70s (Spielberg, Scorsese, De Palma, Coppola...) sont vite rentrés dans le moule d'Hollywood pour faire ce qu'ils savent faire sans prendre trop de risques. Pour le cinéma des années 80, l'esthétique est entièrement écrasée par la puissance financière des groupes qui ont racheté les studios. Les pontes des studios voient progressivement la manne de la vidéo et du public ado s'imposer comme les bases d'un marché juteux. Pour moi le résultat se résume à la série Miami Vice : du soleil, des héros seuls, mais globalement indestructibles, et avec tellement de compensations en nature...

PAS DE FEELGOOD MOVIE DANS MON FILM NOIR, MERCI

Rien ne rapproche notre héros de film noir de Sonny Crockett ou Ferris Bueller ou Bud Fox, le héros de Wall Street, perdu face à Gordon Gekko, un nom qu'on retient plus facilement grâce à l'écrasante présence de Michael Douglas dans ses quelques scènes. Mais l'ambition d'Against All Odds (Contre toute attente - 1984) n'est pas d'être un remake (ou alors ils ont vraiment perdu le fil et la bobine en cours de route !), ce qui évite déjà au film d'être jugé, et descendu en flammes, sur ce plan là par les fans de films noirs. Le film de Taylor Hackford ne fait que reprendre le fond de l'intrigue pour en faire un film romantico-policier. Ce genre, finalement assez typique des 80s (Polanski va malheureusement marcher dedans avec Frantic) n'avait pas d'avenir, comme toute l'esthétique des années 80 qu'on essaie de nous refourguer aujourd'hui. Pourtant j'ai un petit faible pour ce film mineur. Jeff Bridges y est excellent, même si son rôle est trop propre comme tout ce qu'on lui demande à l'époque, entre la guimauve de John Carpenter (Starman) et l'insignifiant dernier film de Hal Ashby (8 millions Ways to Die) dont le potentiel noir a été laminé en cours de production. Et Rachel Ward est sublime. John Woods est très bon aussi, comme toujours, mais son rôle est trop limité par rapport à la menace sournoise incarnée par Kirk Douglas dans l'original.

Bref on peut voir ces deux films indépendamment, sans se douter d'une vague filiation entre eux. Le premier est tout simplement excellent, l'autre peut faire passer un bon moment si on n'en attend rien de particulier. Quoique cet exemple ne soit pas très convaincant, il reste que la meilleure façon de concevoir un remake est de s'affranchir totalement du film original. Si le film original est un chef d'oeuvre on part perdant, mais contre toute attente on peut alors en sortir qqch d'intéressant et, paradoxalement, d'original.
So take a look at me now, cos there's just an empty space
And there's nothing left here to remind me,
just the memory of your face
Just take a look at me now, well there's just an empty space
And you coming back to me is against the odds and that's what I've got to face.

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