mercredi 6 septembre 2006

Aujourd'hui bien moins que demain

Les gens qui ont fait le cinéma se sont d'abord formés sur le tas, puis des écoles sont venues répondre à la demande, mais moins celle de l'industrie que celle des gens qui rêvaient de faire du ciné : la professionalisation des métiers du cinéma c'est d'abord faite par le haut. Aujourd'hui ces écoles ont une certaine importance pour les métiers techniques mais elles n'ont bien-sûr jamais constitué un passage obligé. (Parenthèse personnelle le cinéma ne manquera jamais de techniciens, ou de gens motivés pour le devenir, ou encore d'auteurs mais bien plus en revanche de spectateurs qui ont envie de se déplacer dans les salles, qui ont envie de voir des films différents... Ici il y a un vrai manque d'éducation et la télé d'aujourd'hui contribue à creuser le fossé entre les cinéphiles et les autres)
Mais ces écoles sans lesquelles le cinéma se porterait aussi bien sont très en retard sur l'évolution. Comme toujours ceux qui font les programmes scolaires sont rarement des visionnaires et malheureusement souvent pas les plus compétents.

La révolution numérique, internet... tout ça ne veut rien dire en soi mais quelque chose en sort peu à peu, change nos habitudes de citoyen (soyons optimistes), de consommateur et nos habitudes professionnelles (pour ceux qui s'adaptent le mieux). Les éditeurs de musique, après s'être gavés durant des décennies se sont aggripés à leur bénéfices le plus longtemps possible avant de comprendre que le modèle économique changeait (comme les compagnies pétrolières ils feront tout pour ralentir l'évolution, sauf qu'elle sera de toute façon beaucoup plus rapide dans leur cas).
Un des gros problèmes aujourd'hui est que beaucoup d'esprits fénéants veulent tirer un parallèle entre l'industrie du mp3 (qui vendra donc désormais de la zique en qualité moyenne comme produit d'appel) et l'industrie du cinéma. Et l'industrie du cinéma ne sera jamais réduite à l'industrie de la VoD, la vidéo à la demande c'est à dire encore une fois le téléchargement comme consommation immédiate légalisée, encadrée et favorisée.
Le tout-numérique suppose une approche globale du secteur et pas juste de regarder par le petit bout de la lorgnette où les bénéfices vont se faire si on pousse la technologie. De même qu'un groupe n'existe pas sur la durée s'il ne fait pas de concert le cinéma non plus ne pourra se passer du contact direct avec les spectateurs dans les salles. Un gros problème qu'on a en France c'est de croire qu'avec les encartés on a stabilisé "le marché" alors qu'on a simplement fidélisé sous une bannière des gens qui allaient déjà souvent au cinéma. Et pourtant personne ne veut imaginer qu'un jour le cinéma aura perdu pied avec le spectateur lambda, que le public des salles sera minoritaire comme celui de l'Opéra.
Heureusement certains font des films qui veulent toucher les gens au plus profond, pas simplement cibler un public qui va au cinéma pas habitude (par désoeuvrement aussi). Ces films qui font venir toutes les franges de la population en salles satisfont tout le monde mais l'industrie du cinéma est encore trop préoccupée à compter ses bénéfices sur les DVD (tant qu'il en reste) pour réfléchir à comment favoriser ce genre de miracle dans les salles. C'est bien connu, les miracles demandent beaucoup de foi...
Là où l'espoir existe encore c'est que, pour en revenir à l'éducation du ciné, on commence à prendre en compte le 7e art comme autre chose qu'un mélange d'art et d'argent plus ou moins heureux. Forcément une telle approche pragamatique ne pouvait venir que des Etats-Unis, et quoi qu'on en dise elle ne peut que favoriser la réflexion sur le devenir du cinéma.
“We are not turning out people who are going to be editors, cinematographers, writers, directors,” said Dr. Lehman, who observed that there are too many such film schools already.

“Ideally we should be teaching students to think of film in relation to new media in a quite different model than we had in the past,” he continued. “It’s not as simple as, ‘We need content for a new delivery system.’ It’s more, ‘We need to understand the new technology and how it will shape entertainment.’ We’re creating a new industry job, as it were.”
Sharon Waxman NYT Sept. 6
Quand les générations pour qui les nouvelles technologies sont un fait remplaceront complètement les dinosaures on pourra peut-être y voir plus clair.

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