mardi 10 novembre 2009

La pub dans Télérama n°3122

Sur les 80 premières pages précédant les programmes télés : 23 pages de publicité + 3 doubles pages (dont la fameuse double-page pour l'écran Philips 21:9 à 4k€) soit plus de 36%. Je n'inclus pas la couv, ni les encarts et les enveloppes délicatement placées avec le magazine à l'attention de l'abonné. Et je ne compte pas non plus les offres internes de Télérama gentillement placées en page de gauche, donc bien moins intrusives.

Bref, nettement plus d'une page sur trois est de la pub. Supporterait-on une chaine télé où il faudrait zapper aussi souvent ? On en est à 12 minutes par heure (soit 20%) sur les chaines privées et c'est déjà pénible. Que serait une chaine avec 22 minutes de pub par heure ? J'imagine que Télérama serait le premier à s'en offusquer. Quoique. J'ai l'impression qu'on est bien loin du magazine d'il y a quinze ans.
Je vais essayer d'en retrouver un pour faire la comparaison.

L'Enfer d'Henri-Georges Clouzot



J'étais allé il y a déjà bien 2 ans à la présentation d'une sélection d'images dans l'auditorium du Louvre. Des images magnifiques révélatrices d'une atmosphère qu'on aurait aimé découvrir dans un film fini. A défaut du chef d'œuvre qu'aurait pu être L'Enfer de H-G Clouzot, on peut donc désormais satisfaire sa curiosité, et bien plus, avec le documentaire co-réalisé (sur 2 ans 1/2) par Serge Bromberg, l'homme par qui l'amour du cinéma revient.

The Battle over Content 2

Ce post fait suite à The Battle over Content que je publiais il y a un an. Pour résumer j'écrivais pour répondre à Tristan Nitot qui s'offusquait du fait que des blogs populaires se laissent tenter à faire du publi-rédactionnels, ce qui dénature complètement l'esprit du web. En particulier c'est un argument pour dire, au pire avec ce vieux débris de Séguéla, que le web est un immense bordel où règne les pires rumeurs, où se montent les pires calomnies, mais aussi dans le meilleur des cas c'est tout simplement un argument pour dire que les blogueurs et les infos tirées du web ne valent rien par rapport à de bons journalistes qui connaissent très bien leur métier.

Et qui travaillent sous les ordres de Dassault au Figaro, ou de manière plus générale dans un canard largement dépendant de ses rentrées publicitaires ou des exclusivités accordées ? Qui fait du journalisme d'investigation en France à part le Canard Enchaîné qui justement n'est pas financé par de la publicité ? Personne. Et il faut chercher sur le web pour trouver justement de nouvelles manières de faire du journalisme plus près des gens et moins proche du pouvoir (de l'argent, du politique) avec par exemple Rue89 ou Bakchich.info (en espérant que ce dernier survive malgré le positionnement sur le créneau des hebdos satiriques du mercredi).

Face à l'offensive des programmes TV gratuits Télé 7 jours, autrefois la référence dans les chaumières, est à la ramasse. Pas grave, ça n'a jamais été du journalisme (pas plus que les interviews de Drucker en tout cas) et il y a Télérama pour remonter le niveau chez les gens plus exigeants, mieux éduqués, et blablabla. J'ai toutefois arrêté de le lire régulièrement : d'une part parce que ça fait 15 ans que je n'ai plus la télé, mais surtout parce que j'y ai noté une forte surcharge publicitaire après le virage du rachat par le groupe La Vie-Le Monde. Condition à sa survie et à la préservation de son identité nationale nous expliquait-on.

J'ouvre la semaine dernière le Télérama n°3121 qui fait sa couverture sur un dossier "La télévision numérique mode d'emploi, 52 pages de conseils". Le reportage sur La presse italienne contre Berlusconi et le portrait de Patrick Buisson ne font l'objet que d'une mention, mais je ne remarque pas ça sur le coup : malgré mon esprit critique acéré mon premier regard ne s'occupe heureusement pas de juger a priori. En y réfléchissant ce dossier, pas du tout de fond, aurait plus sa place chez 60 millions de consommateurs par exemple. Mais il ne s'agit pas non plus de tests, de critiques du matériel pour regarder la télé en 2010. A feuilleter les 52 pages on y voit surtout une sorte de catalogue Fnac destiné à faire rêver les CSP+ à l'approche des fêtes. Tout ça, encore une fois, c'est mon esprit critique a posteriori qui le me le fait dire. Le déclencheur c'est cette pub dans le numéro suivant (3122): double-page sur le téléviseur Philips Cinema 21:9 (pages 9-10). En y regardant de plus près il y a déjà une pub pour cet TV (et une autre) en page 2 du dossier ! C'est vrai que pour fourguer un écran cinémascope à 4000€ il faut mettre le paquet pour toucher les CSP++ et leur remettre le produit sous le nez pour faire monter le désir. Il ne doit pas y avoir beaucoup de fétichistes du Cinémascope (en fait 2.35 c'est le ratio du format de référence Panavision nous apprend au moins Télérama) donc il faut susciter l'achat d'impulsion, vite !

Bref, tout ça pour dire que l'argument de dire que le seul journalisme qui compte dans une démocratie c'est le journalisme papier, c'est du pipo. Le journalisme papier a beaucoup de leçons à tirer de ce qui se passe sur internet, comme les maisons de disques et les distributeur et éditeurs de contenu ciné. Le journaliste papier doit vendre du papier, ce n'est pas un service public (et heureusement question indépendance du pouvoir), et pour mériter son salaire la jalousie de ses confrères (pour une exclu obtenue) est plus importante que l'admiration.

A suivre : une petite analyse du poids de la pub dans Télérama.

dimanche 8 novembre 2009

Déjà vu : A Star is Born

Pygmalion, voilà un concept fort pour le cinéma et qui, bizarrement n'a pas été tant utilisé que ça sur le grand écran. En revanche George Cukor, que Clark Gable aurait fait virer d'Autant en emporte le vent parce qu'il dirigeait plus Scarlett O'Hara que Rett Butler, était manifestement très inspiré par le mythe. Il faut dire que Cukor est le réalisateur ayant "obtenu" le plus de nominations aux Oscars pour 21 acteurs dfférents qu'il a eu l'occasion de diriger. On en retient des rôles de femmes surtout (Katharine Hepburn, Audrey Hepburn, Judy Holiday...), mais pas seulement (James Stewart obtient l'Oscar en 1941 pour The Philadelphia Story alors que ses deux partenaires féminines se contentent d'une nomination).

Pygmalion c'est la pièce de George Bernard Shaw qui se trouvera convertie en comédie musicale à Broadway (1956) puis au cinéma par Cukor (1964) : My Fair Lady. Mais avant cela c'est une histoire de Pygmalion moins comique (et moins musicale) que Cukor avait déjà ré-adapté en réalisant le remake d'Une Etoile est Née (1937).

Pour avoir vu d'abord le remake en version 'restaurée' de 3h je pourrais ne pas être objectif en disant que la version rafraichie est meilleure. Sauf qu'elle est nettement meilleure. La réalisation est plus fluide alors que le film original est très, certainement trop, académique. Janet Gaynor soulève difficilement l'enthousiasme alors que c'est un rôle où l'on doit tout donner pour faire accepter au public cette histoire de jeune fille naïve qui devient une star. Fredric March est très bien de son côté mais on sent qu'il pourrait donner plus. Cukor, lui, donne une vraie dimension émotionnelle à l'histoire en dirigeant Judy Garland et James Mason.

Ceci dit, même réalisées sans chaleur, toutes les scènes clés sont déjà dans le film original, ce qui me permet de saluer un magnifique travail d'écriture de la part des scénaristes. La version de Cukor est aussi beaucoup plus longue, et avec les parties 'restaurées' (le son original sur des photos remplaçant les images perdues...) il est facile de dire trop long. Mais la longueur vient justement des scènes où l'on voit vraiment Esther devenir une star. Quoiqu'il en soit la dernière réplique, dans les 2 versions, me tire toujours les larmes aux yeux, donc, encore une fois, un réalisateur moyen ne peut pas complètement saloper un beau script.

PS. Pas vu : le re-remake de 1976 avec Barbra Streisand et Kris Kristofferson (ça sent un peu trop le véhicule calibré pour Streisand). Et on annonce un re-re-remake pour 2012 : une version moderne où une chanteuse aguerrie (Carla) emmènerait son mari en haut du hit-parade des vendeurs de soupe ?

lundi 5 octobre 2009

Hadopi 2 : Hadopi font du ski

Renforcé dans leurs bottes crottées par le vote d'Hadopi2, les lourdeaux de la Sacem qui brament contre le scandale du téléchargement illégal en remettent une couche sur le besoin de taxer les fournisseurs d'accès internet. Pourquoi ? Parce qu'ils auraient bénéficié, implicitement de l'offre de téléchargement illégal pour développer leurs ventes d'abonnement Haut-débit.

Quand bien même il serait prouvé que l'argument tacite du téléchargement gratuit et illégal a joué un rôle prédominant dans le développement commercial des FAI, encore faudrait-il mesurer cet impact. Des parents qui prennent un forfait Triple Play et qui ne connaissent pas grand chose à internet, contrairement à leurs enfants qui vont eux, éventuellement, télécharger en masse n'ont certainement pas pris en compte cet argument. Au contraire, moins ils s'y connaissent en informatique/internet plus ils vont avoir tendance à éviter de télécharger et à l'interdire à leurs enfants.

Mais pour avancer sur ce débat il faudrait faire une étude approfondie des arguments marketing des FAI en fonction de leurs résultats. C'est largement possible, même s'il n'est pas évident de se mettre d'accord sur un protocole d'étude, parce que les FAI sont des entreprises qui publient leurs résultats et doivent rendre des comptes à leurs actionnaires. Or la Sacem est un organisme tout ce qu'il y a de plus opaque.
Bref, quand la Sacem voudra bien faire preuve de plus de transparence dans sa gestion elle pourra peut-être commencer à demander des comptes à des entreprises dont l'activité s'exerce sur un secteur concurrentiel, par opposition à une administration privée établie dans un quasi-monopole de fait.

A lire aussi : tweeté par Ziknblog, un sondage Ipsos que n'utilisera pas la Sacem dans ses arguments fallacieux.

mercredi 23 septembre 2009

Les Délices d'Hadopi

C'était prévisible. Raphaël Anglade nous signale que les journalistes papier (au cerveau plus lent et plus servile que celui de leurs confrères qui pensent d'abord Internet) viennent de se rendre compte qu'Hadopi n'est qu'un prétexte au contrôle du web.

Évidemment ils ne s'en seraient toujours pas rendu compte s'il n'y avait pas une mesure qui les touche directement :
Les "œuvres" des journalistes pourront désormais être exploitées sans rémunération supplémentaire sur tous les supports d’un même titre.
Hé oui, on ne peut pas copier sans limite les œuvres des artistes, mais les journalistes ne sont eux que des ouvriers de l'actualité et de la propagande.

Après le petit bout de loi empêchant la secte de Scientologie d'être dissoute en France (et toutes les personnes morales convaincues d'escroquerie), les amendements votés pour limiter l'inégibilité des parlementaires, il y a vraiment qqch de pourri au royaume de Sarkozie. En tout cas un sacré sens inné de la mission de droit divin, balancé sans complexe au beau milieu de la République et sa difficile définition du bien commun.

jeudi 17 septembre 2009

Déjà vu : Out of the Past/Against All Odds

Out of the Past (La Griffe du passé - 1947), aussi connu sous le titre de Build my Gallows High (Pendez-moi haut et court), est tout simplement un des chefs d'oeuvre du film noir. L'idée d'en faire un remake est donc éminement foireuse d'entrée, et à plus forte raison s'il s'agit de faire le remake au coeur des années 80.

Notre petite jurisprudence D.O.A. nous montre en effet que les insouciantes, lumineuses et tape à l'oeil 80s sont tout ce qu'il y a de plus éloigné visuellement de l'époque des films noirs. Le contexte morose se prête pourtant aux histoires de héros poursuivis par la fatalité, mais en plus du manque d'un style propre après la fureur des années disco, de la libération sexuelle, les années 80 sont assommées par le retour des valeurs (morales) des années Reagan sur fond de crise économique permanente, au détriment du sens de la vie (c'est le travailler plus pour gagner plus avant l'heure). Ajoutons à ça que la "nouvelle vague US", les jeunes réalisateurs prometteurs des 70s (Spielberg, Scorsese, De Palma, Coppola...) sont vite rentrés dans le moule d'Hollywood pour faire ce qu'ils savent faire sans prendre trop de risques. Pour le cinéma des années 80, l'esthétique est entièrement écrasée par la puissance financière des groupes qui ont racheté les studios. Les pontes des studios voient progressivement la manne de la vidéo et du public ado s'imposer comme les bases d'un marché juteux. Pour moi le résultat se résume à la série Miami Vice : du soleil, des héros seuls, mais globalement indestructibles, et avec tellement de compensations en nature...

PAS DE FEELGOOD MOVIE DANS MON FILM NOIR, MERCI

Rien ne rapproche notre héros de film noir de Sonny Crockett ou Ferris Bueller ou Bud Fox, le héros de Wall Street, perdu face à Gordon Gekko, un nom qu'on retient plus facilement grâce à l'écrasante présence de Michael Douglas dans ses quelques scènes. Mais l'ambition d'Against All Odds (Contre toute attente - 1984) n'est pas d'être un remake (ou alors ils ont vraiment perdu le fil et la bobine en cours de route !), ce qui évite déjà au film d'être jugé, et descendu en flammes, sur ce plan là par les fans de films noirs. Le film de Taylor Hackford ne fait que reprendre le fond de l'intrigue pour en faire un film romantico-policier. Ce genre, finalement assez typique des 80s (Polanski va malheureusement marcher dedans avec Frantic) n'avait pas d'avenir, comme toute l'esthétique des années 80 qu'on essaie de nous refourguer aujourd'hui. Pourtant j'ai un petit faible pour ce film mineur. Jeff Bridges y est excellent, même si son rôle est trop propre comme tout ce qu'on lui demande à l'époque, entre la guimauve de John Carpenter (Starman) et l'insignifiant dernier film de Hal Ashby (8 millions Ways to Die) dont le potentiel noir a été laminé en cours de production. Et Rachel Ward est sublime. John Woods est très bon aussi, comme toujours, mais son rôle est trop limité par rapport à la menace sournoise incarnée par Kirk Douglas dans l'original.

Bref on peut voir ces deux films indépendamment, sans se douter d'une vague filiation entre eux. Le premier est tout simplement excellent, l'autre peut faire passer un bon moment si on n'en attend rien de particulier. Quoique cet exemple ne soit pas très convaincant, il reste que la meilleure façon de concevoir un remake est de s'affranchir totalement du film original. Si le film original est un chef d'oeuvre on part perdant, mais contre toute attente on peut alors en sortir qqch d'intéressant et, paradoxalement, d'original.
So take a look at me now, cos there's just an empty space
And there's nothing left here to remind me,
just the memory of your face
Just take a look at me now, well there's just an empty space
And you coming back to me is against the odds and that's what I've got to face.

mercredi 9 septembre 2009

RIP! A Remix Manifesto

Le PDG de Sony Music France, et président du Snep, ferait bien de regarder le documentaire Rip, A Remix Manifesto avant de se ridiculiser par sa petite poussée d'urticaire.

Encore un peu et il va traiter les gens qui critiquent Hadopi de terroristes (c'est déjà le fond de la pensée unique qu'il partage avec ces potes bloqués du bulbe: pirates = pas de quartier). C'est sûr que c'est le genre d'argument à faire un beau débat démocratique.

UN PERE FOUETTARD A LA PETITE SEMAINE
Christophe Gnagnanère, tu as du temps à perdre à commenter les propos d'anonymes que tu présentes comme pas du tout crédibles. Tu dis que les opposants à Hadopi sont des délateurs parce qu'ils veulent publier la liste des députés qui ont voté pour la loi ? Parler de délation alors qu'il est tout à fait normal, pour commencer, de vouloir savoir à quelles discussions a pris part son député, puis comment il a voté, c'est de la malhonnêteté intellectuelle. T'as beau jeu de montrer ta gueule, tu ferais peut-être mieux d'essayer de dire des trucs mieux argumentés en te cachant sous un pseudo et de t'exposer seulement le jour où tu es sûr d'avoir tout compris.

De toute façon, inutile de discuter avec des gens qui sont techniquement (et intellectuellement) incapables d'avoir le moindre recul sur leur secteur et l'évolution du monde. S'ils avaient la capacité de comprendre, l'ouverture d'esprit, s'ils n'étaient pas aveuglés par la colère face à ce qui menace leur haute opinion d'eux-mêmes, ils iraient de l'avant et investiraient leur énergie, leur temps et leur salive dans un business innovant. Ils ne resteraient pas raides dans leurs bottes à défendre leurs châteaux de sable menacés par le réchauffement climatique.

lundi 24 août 2009

Speedciné

Depuis un an environ j'entends parler de gens qui regardent des films (des épisodes de leur série préféré pour commencer) en streaming. Peut-être parce que je deviens vieux, je reste fidèle au bon vieux téléchargement qui me permet de regarder le film quand je veux une fois qu'il est sur mon dur. Au passage il m'est arrivé de télécharger certains films (700 Mo) en moins d'une demi-heure... pas sûr que le streaming permette le même confort de visionnage.

Le gros argument du streaming c'est qu'il n'y a rien d'illégal pour l'internaute. Personnellement je trouve ça très petit comme justification, c'est vraiment de l'hypocrisie. Quand je télécharge un film je n'ai pas honte et je n'essaie pas de me mentir sur le caractère légal du truc. Je ne le fais pas non plus par esprit revendicatif, mais simplement comme un consommateur lambda abreuvé de pub pendant des années qui se retrouve avec un service "instant gratification" plus performant que tout ce qui existe sur le marché officiel.

Si demain tout le monde se met à laisser les clés sur sa voiture et que les gens n'abusent pas du système, je peux donc, en cas de besoin, conduire dans une voiture "volée" (en tout cas sans avoir les papiers en règle) en bas de chez moi, ce qui m'évite par exemple d'en acheter une ou de prendre un taxi. Surtout, dans la mesure où une voiture est dispo en bas de chez moi, le service défie toute concurrence.

Le haut-débit + les rythmes de consommation frénétiques, la génération kleenex, tout ça contribue à bousculer les éditeurs de contenus trop longtemps habitués à tenir fermement les vannes de leur catalogue.

Fondamentalement est-ce que le streaming change quelque chose ? Oui s'il tend à montrer le gaspillage d'énergie de courir après des voleurs à l'étalage par rapport à la lutte contre le terrorisme par exemple.

Comme le démontre Chris Anderson dans son dernier livre, il faut bien comprendre que l'économie de l'internet suppose d'accepter d'offrir du contenu gratuit pour toucher un maximum de personnes, parmi lesquelles une minorité paiera pour avoir du contenu premium, c'est à dire dans le cas d'un film, de le voir dans des conditions meilleures que sur un écran d'ordinateur et en dépendant du débit des données en mémoire tampon et de la qualité de l'encodage pirate.
C'est évidemment contre-intuitif pour tous les vieux cons comme moi qui sont nés bien avant qu'internet n'explose, mais c'est comme ça, il faut savoir écouter, comprendre et s'adapter.

Pour l'instant, l'avenir du streaming parait lié au développement des offres de VOD. Speedciné est un site portail tout ce qu'il y a de plus légal, mais à la base il propose le même service que n'importe quel répertoire de torrents. La garantie de qualité (c'est le minimum) du fournisseur en plus.
Petit détail supplémentaire auquel je tiens, il met en avant une catégorie de films gratuits (en fait, tombés dans le domaine public la plupart du temps) comme le font publicdomaintorrents.com ou archive.org de manière nettement plus underground. Le gratuit est donc encore une fois présent et c'est lui qui crédibilise un service dès le départ, et sur le long terme.

mercredi 8 juillet 2009

Exces de vitesse sur internet

Au cinema on ne fait des suites que quand un film a cartonne. Hadopi a en effet bien cartonne, dans le sens d'un beau carambolage legisatif, et c'est peut-etre pour ca qu'Hadopi2 fait la concession de mettre la justice dans la boucle, mais au niveau d'une procedure sur ordonnance genre exces de vitesse constate = coupable presume.

Plutot que de suivre connement les atermoiments de notre omnispresident, le monomaniaque du refoulement profond pour le citoyen inconnu et de la legion d'honneur pour ses courtisans, mettons un peu de perspective.
Samedi on annoncait la mort (dans l'indifference generale de la presse franchouille) d'Allen Klein. Celui-ci fut un manager impitoyable autant pour ses clients comme les Stones, les Beatles, que pour son propre compte. Son approche pour seduire ses clients ? Comptable New-Yorkais, il aura ete le premier a voir combien les maisons de disques exploitaient leurs artistes, a l'exposer et donc a obtenir des contrats bien plus juteux pour ses clients, quitte a se servir un peu trop au passage. Ces contrats juteux d'alors sont aujourd'hui la norme puisque il s'agissait, avant meme la negociation des conditions financieres, de bien attribuer leurs droits aux artistes. Avant Allen Klein, les royalties n'etaient qu'une obole conditionnelle accordees aux auteurs... Les rapaces de l'edition profitaient d'un fait : s'il y a bien une categorie professionnelles qui ne pense pas a sa retraite, c'est les artistes.

Alors aujourd'hui on vient defendre les maisons de disques, ces grands mecenes de la cuture ? Il faudrait remettre les choses en perspective une bonne fois pour toutes, et considerer l'evolution du secteur sur le long terme. Oui,forcement ca depasse la majorite des hommes politiques qui vivent a la -courte- echelle d'un mandat, d'une echeance electorale. Malheureusement les plus ambitieux vivent concretemenet leur posterite sans depasser le stade du poster.

mardi 7 juillet 2009

The Fog of War

Étrangement hier soir j'ai eu envie de revoir le puissant documentaire d'Errol Morris. Le début au moins, avec une courte scène de McNamarra dans son élément au coeur des 60s, qui enchaîne avec une générique qui pose on ne peut mieux le sujet, et l'émotion grace a la composition magnifique de Philip Glass.
Le lendemain j'apprends la mort de McNamara. La question que tout le monde me posait, apres que j'ai offert moultes fois le film en DVD (alors qu'au départ je l'avais téléchargé... f*ck Hadopi), tenait au jugement à porter sur cet homme qui essaie de s'amender en exposant toutes ses erreurs qui ont causé tant de morts civiles et militaires.
Bizarrement je ne me suis jamais pose la question de juger le personnage, peut-être trop subjugue par la puissance du documentaire dans son intégralité, pas juste comme un documentaire sur McNamara. C'était peut-être aussi son but de généraliser a partir de son expérience pour oter la pression de ses erreurs.

Si réponse il doit y avoir sur McNamara, celle-ci me parait la plus simple :
It's true, he was much more than a number cruncher. He was a sentimental, emotional man, tortured in some ways. But more than anything, he was a man who wanted to, needed to, be in control. And he could not be that man—no one can.
from
Newsweek

mercredi 6 mai 2009

138

Voilà de quoi mettre du baume au coeur : alors qu'après toutes les manigances en coulisses pour saboter le côté contraignant (pour Hadopi) de l'amendement 138, plus personne ne croyait aux chances de revoir le Bono/Cohn-Bendit, hé bien pourtant c'est fait !
La réaction de Guy Bono n'a pas tardé à nous parvenir :" C'est une nouvelle claque pour Sarkozy et le gouvernement français. Le Parlement a dit non à Sarkozy autant sur le fond que sur la forme. Les eurodéputés ont dit non à la riposte graduée et non aux pressions inadmissibles exercée par la France sur le premier organe démocratique du continent européen. "
J'ai toujours pensé que Sarkozy serait, au bout du compte, victime de son gros défaut de vouloir imposer sa volonté coûte que coûte.

mardi 28 avril 2009

William Morris + Endeavor = Will MorE?

Article pas très intéressant en soit (simple juxtaposition de déclarations à chaud sans travail de mise en perspective) mais qui illustre les changements que vont subir les professions intermédiaires des médias.
Mr. Emanuel, whose brother Rahm is the White House chief of staff, told agents who flocked to his office that the weak economy was a major impetus to consolidation.
Entre deux répétitions de détails sans importance sur la nouvelle organisation des 2 "majors" de la représentation de talents William Morris + Endeavor, il est vaguement évoqué l'opportunité de "rationaliser" en période de crise. Par la bouche du charismatique frère de celui qui joue le rôle du "méchant" à la Maison blanche, ça passe mieux.
For years, virtually every significant Hollywood agency has explored possible mergers with competitors as companies looked for growth and new horizons at a time when core movie and television businesses have been constrained by digital inroads and cost cutbacks.
A l'heure où les banquiers recommencent à se sucrer, grâce à l'argent des contribuables, la "crise" pousse un peu les agents artistiques à prendre en compte les mutations plus profondes de l'économie numérique, et notamment le fait que les intermédiaires vont devoir travailler beaucoup plus pour justifier leurs 10% de commission sur tout ce qui bouge.
Ou alors, les agences rationalisées vont se concentrer sur les gros coups, laissant la place à un nouveau marché pour des "offres" alternatives. Ce serait pas mal aussi.

lundi 27 avril 2009

Epuration ou réconciliation numérique ?

Aujourd'hui, très belle réponse du berger aux mégères malaprises qui s'énervaient la semaine dernière contre le vote du PS pour repousser Hadopi (voir post du 22/4).

La réponse est complète, argumentée sans passion contrairement à ces pauvres cinéastes déconnectés qui prennent encore leur position dans la société au sérieux.
La loi censée défendre l’exception culturelle devient une « loi d’exception » en Europe. Dès lors, en refusant le fait du prince, comme nombre de députés de la majorité, nous ne comprenons pas en quoi nous devrions demander pardon aux artistes qui nous ont toujours trouvés à leurs côtés dans l’action gouvernementale comme dans nos politiques locales. Nous voudrions juste que ceux qui nous interpellent prennent conscience que voter une loi est un acte plus grave que de signer une pétition. C’est un engagement au service de l’intérêt général dont on doit répondre la tête haute, sans raser les murs.

Lorsque la loi est mal foutue et qu’elle ne règle rien, il vaut mieux que la main du législateur tremble et qu’elle refuse de céder à la politique de « l’Hadopire ». On nous rétorque qu’il n’y a pas d’alternative. On refuse même de débattre de notre proposition de « contribution créative » au prétexte qu’elle ne serait pas à la hauteur des enjeux financiers du téléchargement. De qui se moque-t-on  ? La redevance de deux ou trois euros mensuels que nous proposons couplée à la réorientation de la taxe sur les FAI générera près d’un milliard d’euros pour rémunérer chaque année les droits d’auteurs, quand Hadopi ne leur rapportera pas un centime. Elle est aussi l’occasion de forcer un dialogue, sans haine, sans anathème, auquel se refusent aujourd’hui l’Etat et les majors, sur les coûts de fabrication et de diffusion des produits culturels.

Forcer le dialogue, rentrer dans le détail de la ventilation des bénéfices créés par les produits culturels, voilà ce que les puissants intermédiaires de la Culture veulent éviter à tout prix. L'apport des labels d'une Major, d'un conglomérat de production/distribution/exploitation dans le cinéma, d'une société d'auteurs... serait ridiculisé une fois mis à nu au beau milieu de l'économie numérique. Du moins dans l'état actuel de la volonté de ces brontosaures de la Culture de s'adapter.
Qu'ils meurent avec leur trésor de guerre et les souvenirs de leur rente de situation. Personne ne viendra les pleurer, ni les artistes, ni même leurs anciens actionnaires qui comprendront vite aussi où se nichent les gisements de croissance de l'économie.

mercredi 22 avril 2009

Les vieux de la veille

15j après la bataille, JJ Annaud, Philippe Lioret, Bertrand Tavernier, Danièle Thompson... publient une tribune dans Libé, pour dire quoi ? Qu'ils ne sont vraiment pas contents du vote des socialistes contre Hadopi. Ils se sentent même un peu incompris, les pauvres, eux qui croyaient que leur oeuvre avaient une dimension sociale.

C'est à dire qu'ils débarquent un peu. Le PS est à la rue depuis un sacré bout de temps, mais globalement ce n'est pas notre problème si on doit encore parler d'Hadopi. La compagnie des vieux cinéastes arrivés reproche aux députés de l'opposition de ne rien faire de constructif ? Mais alors eux aussi ils feraient mieux de proposer qqch au lieu de piquer une colère contre ce vote de détail contre Hadopi.
Et après ils s'étonnent qu'on les traite de bétail, de veaux qui suivent le lobbying de ces intermédiaires de la production qui vont mourir demain, sans qu'Hadopi n'y change rien ? Et c'est les mêmes qui mettront sans discuter leur nom sur une pétition qui parle un peu de droits de l'homme ?

Comme les hommes politiques qui soutiennent cette loi ils sont déconnectés du monde réel, ça fait trop longtemps qu'ils n'ont pas eu de fin de mois difficile. En revanche la création, l'économie de la création, la nouvelle économie/révolution numérique (cette expression date de 10 ans les gars, faut se réveiller, ça ne vient pas de commencer), les nouveaux modes de consommation, un nouveau pricing pour la nouvelle chaîne de distribution/diffusion... tout ça ils connaissent super bien, c'est des spécialistes. De sacrées têtes pour tout dire, il faudrait vraiment réfléchir à leur attribuer un Prix Nobel de l'économie, de la Paix et en créer un aussi pour le Cinéma qui porterait leur nom.

lundi 20 avril 2009

La gratuité en question

Chris Anderson, le rédacteur en chef de Wired, auteur il y a 4 ans de The Long Tail (La Longue Traîne), est donc quelqu'un qui connait un peu mieux internet que la majorité des élus qui travaillent, parfois, à le réguler (le discours du vieux sénateur républicain corrompu de l'Alaska - belle carte de visite - Internet is a series of Tubes fait encore rire 3 ans après).

Chris Anderson travaille depuis 2 ans (au moins) à son prochain livre, qui sortira en juillet, sur le phénomène de la gratuité et internet : Free: The Future of a Radical Price.

Il publiait déjà un avant goût de son travail l'an dernier, et j'ai l'impression que ceux qui étaient capables de l'entendre et de réagir à son approche n'ont pas été très enthousiasmés par la perspective d'un débat (synthèse en français ici). Il faut dire que même parmi les plus virulents détracteurs d'épiphénomènes coûteux comme Hadopi, le plus difficile à argumenter est la solution au problème du téléchargement gratuit. Parce qu'intuitivement, avec nos schémas de pensée hérités de la vieille économie, tous ces fichiers téléchargés gratuitement doivent bien correspondre quelque part à un problème, un déficit de ventes. Hé bien non justement. D'un côté il y a des adolescents qui téléchargent massivement, par ennui, par émulation..., mais leur pouvoir d'achat est de toute façon limité alors autant qu'ils participent au buzz gratuitement. De l'autre il y a les adultes qui téléchargent, mais ont, eux, plus souvent l'occasion d'acheter. Ils ne sont pas dans la situation frustrante de l'ado qui découvre tout en vrac et se noie dans la profusion incontrôlée. Les adultes ont une carte de crédit et ne sont qu'à un clic de faire un achat impulsif de tel disque ou de tel film. Sans compter que les produits dérivés non-numériques (livres, gadgets, déco...) n'ont aucune raison de marcher moins bien, au contraire.
Scenario 1: Low-cost digital distribution will make the summer blockbuster free. Theaters will make their money from concessions — and by selling the premium moviegoing experience at a high price.
Ce que nous dit Chris Anderson, en bref, c'est qu'il faut inclure la gratuité dans la manière de penser son marketing. Il a l'air en avance si j'en crois la manière dont le débat est soigneusement évité sur la place publique. Tant mieux, ça veut dire qu'on peut encore être en avance là-dessus (avis aux entrepreneurs qui voient loin) mais aussi que certains vont louper la dernière chance qui leur est offerte de prendre en marche le train de l'économie numérique (adieu veaux, vaches à lait, Sacem et compagnies craignos).

mardi 7 avril 2009

La parole est à la défonce

Dernier mot cette fois promis, et je laisse la loi Hadopi avorter dans son coin.

    2. Refusez systématiquement les Recommandés adressés à l'adresse précise qu'utilise votre FAI (conseillé précédemment par Maitre Eolas). Vous conviendrez que les recommandés sont très rarement des chèques de généreux donateurs. Si vous attendez quand même des RAR importants, ajoutez une ligne dans l'adresse de votre compte Internet (un truc anodin genre "boite n°512a") qui vous permettra d'identifier à coup sûr le farceur qui vous envoie une missive avec force formalités. Deux raisons à ça :
  • le facteur ne sera pas forcément coopératif pour vous indiquer l'expéditeur (surtout s'il vient de se taper 4 étages à pied pour avoir votre signature)
  • si vous n'êtes pas là (ou que le facteur n'a pas voulu risquer de se taper 4 étages pour rien) l'avis de passage ne mentionnera pas l'expéditeur et j'imagine que vous ne voudrez pas faire la queue 1/2h un samedi matin à votre bureau de poste juste pour avoir confirmation que vous êtes dans la base de publipostage des nouveaux emplois vieux créés par Crétine Albanel.

    Pas de bras, pas de chocolat ; pas de preuve légale d'un avertissement, pas de risque de sanction. Et qui c'est qui aura gaspillé l'argent des contribuables en touchant des sous de la Sacem et compagnie ?


Bon je vous laisse, j'ai des téléchargements en retard. Tout ce débat face à des industriels de mauvaise foi et des politiques commis d'office m'a donné une de ces soif de culture gratuite... Comme une envie de commettre un crime gratuit.

"16 gus dans un hémicycle"

Un dernier petit coup sur Hadopi qui a été voté à l'Assemblée Nationale la semaine dernière par 16 députés.

Visualiser le résultat du vote.

Bravo aux 10 députés moutonniers (ou abrutis) de la Majorité Présidentielle qui se sont déplacés pour voter pour.

Bravo aux 2 députés du nous-veaux centre qui se sont déplacés pour s'abstenir.

Bravo aux 4 députés de l'opposition qui ont pris le temps de venir voter contre.


Quand on pense qu'il aurait suffit d'une petite dizaine de députés PS ou PC en plus pour foutre le souk une semaine de plus...

Vive le courage politique.
Qu'on ne vienne pas me reprocher après ça d'appeler à l'abstention totale et au téléchargement intensif jusqu'en 2012.

samedi 28 mars 2009

Hadopi is dead baby

A la veille de la reprise des discussions, on peut déjà annoncer qu'Hadopi est mort. En signe de deuil et de compassion avec tous les éditeurs audiovisuels qui ont cherché à se blackbouler eux-mêmes, ce blog reprend ses couleurs d'origine.

Autopsie d'un fantasme sécuritaire de plus du califat Sarkozy, commandeur des croyants en lui.
  • D'abord tout le battage autour d'Hadopi a fait beaucoup de pub au téléchargement illégal. Les gens qui avaient un vieux LimeWire installé pour télécharger à l'occasion ont commencé à s'intéresser, par exemple, aux clients BitTorrent. µTorrent sur Mac ou PC, Transmission sur Mac ou Linux, Vuze (ex-Azureus)... L'effet nouveauté/découverte aidant ils ont plus téléchargé. Sans compter qu'ils ont dû lire au passage qu'on pouvait exiger que les échanges soit cryptés. Ajoutons à ça les sites de streaming, ou alors les possibilités de services comme RapidShare cités dans la presse

  • L'adoption à près de 95% par le Parlement Européen d'un rapport spécifiant que la connexion Internet "ne devrait pas être refusée comme une sanction par des gouvernements ou des sociétés privées". Certes le Conseil des Ministres avait déjà bazardé l'amendement Bono/Cohn-Bendit l'an dernier, mais ils ne pourront pas éternellement remonter leur caillou. Comme ce qui les intéresse c'est le bien commun et pas leurs petits pouvoirs de législateurs, ils vont vite comprendre..

  • La sanction de la coupure est aussi absurde que de fusiller une dizaine d'otages pour l'exemple. Ceux qui prennent ne sont pas plus coupables que les autres, et les survivants n'en éprouvent que plus de haine pour l'autorité imposée. Plus ils ont de haine, et moins ils vont être ouverts à cette tartufferie de message pédagogique : panpan cucul à l'heure où les parents n'ont plus le droit de mettre une fessée à leurs enfants sans passer pour des bourreaux..

  • Le buzz Hadopi jouait à fond et tout ce petit microcosme de Haut Défenseurs de la Culture Française roulait des mécaniques, se sentant sûrs de leur droit, droits dans leurs bottes pour botter le cul de ces petits merdeux qui leur taillent leur marges de parasites. Petite croisade d'arriérés qui se congratulent et se serrent les pognes dans leur asile pour paranos-dépressifs réfractaires à l'économie numérique. Pendant ce temps, qui fait dans le "constructif" ? Qui sort des offres payantes attractives pour innover sur le plan marketing, imposer un standard de téléchargement commercial ? Personne, ou plutôt si, The Pirate Bay propose un abonnement à 5€ par mois pour anonymiser totalement ses connexions P2P. Si je dois payer je veux évidemment que ce soit pour des sociétés impliquées dans la production audiovisuelle, logicielle... (à défaut d'être directement pour les auteurs) mais d'autres n'ont pas mes scrupules. Hadopi aura bien mérité cette escalade "nucléaire" qui était entièrement prévisible..
Bref, soyons charitables, essayons d'imaginer Hadopi heureux comme Sisyphe. Mais Sisyphe lui n'est pas attaché à son caillou comme à un boulet, donc il lui suffit de se résigner à l'absurde de la situation et de continuer, à son rythme. Hadopi, lui, risque à chaque fois de se faire entrainer et écraser par son propre fardeau (c'est lourd tout l'héritage culturel franchouille !). Hé bien c'est ce qui va arriver au prochain tour. Hadopi est déjà mort et on connait déjà ses dernières paroles : "Monde de merde !"
Qu'est-ce que tout cela peut bien vouloir dire ?

mercredi 25 mars 2009

Ask not what Internet can do for you

La phrase clé du moment, qui m'aide à résumer beaucoup de choses à propos d'Internet, et que ferait bien de méditer tous les blaireaux défenseurs du projet de loi qui va accoucher de la souris albinos Hadopi.

"Pensez d'abord à ce que vous pouvez apporter à Internet, pas à ce qu'Internet peut vous apporter une fois que vous êtes déjà perclus de certitudes inébranlables."

Il s'agit d'une paraphrase de mon cru de ce célèbre passage du discours d'investiture de JFK, repris par Obama pour la sienne : "And so my fellow Americans, ask not what your country can do for you - ask what you can do for your country". Comme les financiers qui ont fait n'importe quoi ces dernières années, les vieux parasites de la Culture restent droits dans les bottes de leur conservatisme, tout en venant pleureur pour se faire assister par l'État...

vendredi 20 mars 2009

L'industrie US et la lutte contre le piratage

John August fait le point sur la pratique pour limiter le piratage des films et notamment éviter que des copies dégeus (CAMs) arrivent à être très demandées sur les réseaux de P2P.

Il s'agit principalement de techniques pour remonter jusqu'à l'origine du piratage (les fameuses watermarks sur les DVD promotionnels, et un système similaire pour les copies en salles).
Ensuite ils adaptent les dates de sortie des films en les retardant dans les pays très sensibles (Asie du Sud-Est) puis en y sortant très vite le DVD derrière (pour éviter les CAMs).

Tout ça pour dire que ce travail est constructif, contrairement au foin (qui va faire un feu de paille) d'Hadopi. Les grands groupes de media s'y prennent un peu tard pour circonscrire la partie de l'incendie qui noircit réellement la façade de leur business, alors c'est vraiment malhonnête de leur part de venir s'attaquer aux internautes par ce qu'ils viennent juste de se réveiller. Mais c'est cohérent avec le fait qu'ils ne comprennent rien à Internet.

mercredi 18 mars 2009

Slumdog Ballon d'air

Danny Boon se plaignait de ne pas avoir la reconnaissance des professionnels via l'académie des Césars. Mais quand on a la reconnaissance du public, de quoi d'autre a-t-on besoin ? Le plus marrant dans l'histoire était toutes les réactions obséquieuses "ah oui, effectivement, on va réfléchir à un César de la comédie." Molière ou Mozart n'ont pas eu de funérailles digne d'un gentilhomme, et alors ?

Les Oscars ne se posent pas la question de récompenser une comédie, ce qui ne facilite pas le boulot de définir le meilleur film de l'année. En 1995 Bravehart, en 1999 Shakespeare in Love, en 2004 Crash : que du gros film à gros sentiments calibrés pour faire pleurer dans les grosses chaumières de Beverly Hills.

L'idée de base du roman m'avait donné l'envie d'aller voir Slumdog Millionnaire à sa sortie, et j'ai fini par aller le voir. Je ne crois pas en avoir attendu trop puisque je n'en connaissais que les prémisses donc, et surtout je me suis soigneusement détourné des conversations qui abordaient le sujet.
Le moins que je puisse dire c'est que le film ne m'a pas subjugué. Je pense que l'histoire marche toute seule, mais je n'aime pas du tout ce réal qui envoie les images à la chaîne. Pour moi c'est autant un film jetable que Trainspotting : beaucoup d'effets visuels pour un contenu qui ne repose que sur des gros effets émotionnels pas chers (le gentil indien des rues, les camés folklo) comme toutes les scènes de torture physique qui te prennent en otage.
C'est pas que j'ai détesté, l'histoire est sympa, mais je ne suis jamais rentré dans le film comme c'est le cas pour les vrais bons films qui te scotchent du début à la fin.
Tout ça tient beaucoup à la manière de découper l'histoire : comme Danny Boyle adore balancer des images et mélanger tout ça façon puzzle, euh je veux dire façon clip, il n'y a pas de place pour le développement des émotions par le jeu des acteurs. D'où le recours régulier à un petit peu de violence sur de gentils indiens innocents, comme un ingrédient pour relever la sauce quand ça devient trop carte postale.
Pour moi tout ça est un peu facile, franchement je pense que le film aurait pu être beaucoup mieux réalisé, mais qu'il marche grace à une histoire simple et forte. L'histoire a quelque chose d'éminement universel. Le problème c'est que tout ça est extrêmement superficiel en l'état.

Finalement c'est peut-être toute simplement le jeu Qui Veut Gagner des Millions qui ramène tout au niveau de la médiocrité tv et empêche l'histoire d'avoir une dimension plus intéressante tout en assurant la brand recognition du produit... Mais je ne veux pas être indulgent avec Slumdog Millionnaire : c'est le montage qui met ce jeu à la con au centre du film, alors qu'il a beaucoup plus à offrir.

mardi 10 mars 2009

Complètement déconnectés !

Maitre Eolas explique qu'en l'état actuel du projet de loi, pour rendre tout ce tremblement inutile, il suffirait de refuser le courrier recommandé de la CPD, la Commission de Protection des Droits. Hé oui, heureusement qu'il y a des spécialistes pour lire les textes, j'ai ainsi appris à cette occasion que la commission Hadopi ne serait qu'un n-ième bureau pour caser des potes aux frais du contribuable (voire à ses dépends si on doute de la compétence des membres) et surtout sans pouvoir autre que consultatif.

La Commission de Protection des Droits, indépendante de l'Hadopi si ce n'est que sa création en dépend, serait la véritable autorité de panpan-cucul méchant pirate de l'espace numérique.

Pendant ce temps Nicodinosaure Seydoux fait toujours plus parler de lui comme président de l'Alpa que comme président de Gaumont :ah, s'il suffisait de produire de bons films au lieu d'essayer d'en fourguer en vrac à n'importe quel prix et surtout le plus cher possible et sans se creuser le citron !
"le nouveau modèle économique est très simple: à partir du moment où le téléchargement illicite et gratuit sera ramené à peu de choses, vous aurez une offre légale formidable qui existera"(1). "Elle existe d'ailleurs déjà; simplement, elle est complètement cachée par cette espèce de fumée du téléchargement illicite".

"Vous avez aujourd'hui 4.000 films disponibles (...) C'est environ 20 ans de ce qui se passe en France sur les écrans. En ce qui concerne la musique, on parle déjà de millions de titres disponibles. Mais comment voulez vous que les gens aillent sur les sites légaux légèrement payants quand vous avez une offre massive illicite?"(2), s'est-il interrogé.

Mais "est-ce que parce que les bijoux sont chers place Vendôme qu'on a le droit de les voler?", a lancé Nicolas Seydoux. "Qu'on arrête de dire que nous sommes ringards: la France est le seul pays au monde où les oeuvres musicales françaises font jeu égal avec les oeuvres américaines, et c'est pareil pour le cinéma. Ne pas lutter contre le piratage, c'est le plus fragile qui meurt le premier: la musique française et le cinéma français".(3)

AP via nouvelobs.com


(1) Il est assez simple de voir comment fonctionne le cerveau de Picsou : psycho-rigide, droit dans ses bottes (même si elles sont pleines de caca), il ne peut pas tolérer que le téléchargement gratuit soit pour lui un avertissement (gratuit aussi) qu'il doit évoluer. Il ne va quand même pas se laisser dicter son business model par des petites évolutions (technologique, des habitudes des consommateurs) de rien du tout !

(2) Oh oui l'offre existe ! Tiens, pas plus tard qu'hier j'ai vu un film loué sur la plateforme neufBox-SFR. 5 ou 6 euros. Mais à ce prix là je peux avoir 2 DVDs ! Dans le catalogue j'ai aperçu l'affiche des Tontons Flingeurs : il m'a fallu plus de 10 minutes pour trouver la sous catégorie où je pouvais sélectionner le film ! Tout ce temps pour voir que le film en location (72h) coûte 3 euros, un film produit il y a plus de 45 ans par Gaumont à ce prix, c'est trop cher. D'ailleurs je l'ai téléchargé gratuitement illico alors que je me serais peut-être laissé allé à le louer à 0,99 euros. Ok le rip trouvé en ligne n'était pas terrible, mais ce n'est pas le genre de film qui va bénéficier d'une sortie Bluray avec son digital et colorisation... beurk (soit dit en passant, le son d'origine est très mauvais, ça c'est la faute à Gaumont).
Sur qui Nicodinosaure pourrait-il se défausser pour m'expliquer que l'offre est aussi nulle et qu'il est plus simple (sans parler du pricing pas adapté) de télécharger via un réseau P2P ?

(3) Encore une analogie foireuse. M. Seydoux a sûrement les moyens d'aller acheter régulièrement des bijoux Place Vendôme (serait-ce un lapsus révélateur du fantasme d'acheter le ministère de la Justice ?), mais il faudrait se dégonfler la tête : cinéma ou musique, il ne se produit que peu de bijoux (surtout chez Gaumont). Tristan Nitot faisait la même remarque quand Luc Besson comparait le téléchargement gratuit au vol de la Joconde. Les bijoux c'est du luxe, la culture, le divertissement sont des besoins. Un bijoutier peut se payer le luxe d'être plus cher que son concurrent (question marketing ça peut rendre ses créations plus attirantes), un éditeur audiovisuel, lui, doit tout faire pour que le client potentiel ait envie d'acheter. Essayer de dissiper la "fumée du téléchargement illicite" (bravo pour avoir évité le terme de pirate, c'est déjà un pas dans le bon sens) ne fera rien de plus que d'attiser le feu qui se consume en-dessous. Tout le battage sur le téléchargement profite aux sites illégaux : sujets multipliés dans les forums, citations dans la presse généraliste, blogs...

Aujourd'hui télécharger une copie illicite est très facile, mais en fait seuls une petite proportion des internautes (<20%) sait le faire. Très facile : tout est relatif car une écrasante majorité de gens n'ont une pratique fonctionnelle de l'Internet (et une maitrise de leur ordinateur au sens large) que très limitée. Le danger, pour Nicodinosaure et sa clique d'arriérés, c'est que demain ma mère puis ma grand-mère deviennent capables de télécharger gratuitement en 1 clic. Là, il sera trop tard pour lancer une offre légale de téléchargement avec des mp3 à 0,09€ et des films à 0,99€.
La culture, quant à elle, française ou pas, elle n'aura toujours pas besoin des contributions de la part de Nico Seydoux ou de la Place Vendôme.

jeudi 5 mars 2009

"Le Monde de demain...

... quoi qu'il advienne nous appartient..."

Une réponse simple au projet de loi Crétinisme & Internement :
"Je n'ai jamais autant gagné ma vie qu'aujourd'hui grâce aux droits dérivés alors que mes musiques sont pillées par les DJ pour des samples et que mes albums sont piratables."

Cerrone, via AFP - cité sur Generation NT

mercredi 25 février 2009

Imposture graduée

La bataille de Nouvelle Zélande fait très peu parler d'elle, et pourtant les ténors toniques qui nous tannent avec leur riposte graduée sont toujours à la recherche d'arguments de propagande très sérieux du style "regardez, eux ils le font déjà." Après le Royaume-Uni, la Nouvelle Zélande, l'utopie (la dystopie plutôt) de la riposte graduée se retrouve vite en porte à faux avec la réalité dès qu'il s'agit de réfléchir sérieusement à sa mise en oeuvre.

C'est donc bien plutôt nos hommes politiques qui sont complètement déconnectés, une fois de plus (ah, s'ils devaient retourner gagner leur vie et jouer aux petits chefs dans le privé après 3 déconnexions...). Pire que ça, ils font le jeu du lobby des éditeurs audiovisuels (et un peu de l'informatique il parait) qui exigent une législation d'exception pour pallier leur incapacité à faire évoluer leur métier. La malhonnêteté intégrale (on peut parler de corruption, au moins de corruption de la capacité à se consacrer au bien public) a poussé Numérama à lancer une pétition contre Christine Albanel sur Facebook.

Sans rentrer dans le détail, cette riposte graduée est un terme tout aussi violent que celui de pirates, métaphore d'un criminel sanguinaire employée à tout va pour désigner quelqu'un qui téléchargerait gratuitement, et participe à la propagande générale. Propagande : le mot n'est pas trop fort puisqu'il s'agit de faire de la désinformation pour imposer par la force (les puissants contre le peuple) une législation ultra-répressive. Riposte graduée, c'est un terme fort qui nous vient des heures les plus sombres de la Guerre Froide. La riposte graduée consistait à ne pas déclencher l'apocalypse nucléaire tout de suite (destruction mutuelle assurée) bien que, concrètement, l'escalade devienne d'autant plus simple qu'il y a une procédure échelonnée. Heureusement on ne fait pas encore la chasse aux sorcières, on est loin d'un état de psychose généralisée. Mais la propagande est là. Devant la falsification en profondeur des arguments avancés, devant la répétition effrénée des mêmes mensonges, la mise en scène de la mort de la culture à cause d'un danger venu de l'intérieur, j'ose même parler de Protocoles des Sages du Son et de l'Image. Si ces sages-là sont, eux, bien réels, leur volonté de se recroqueviller sur le passé, leur peur pathologie de "l'autre" qui les conduit tout naturellement à trouver des boucs émissaires parmi leurs propres clients, nous conduisent tout droit vers ce Comité de Salut Public de la Culture par une loi d'exception : une loi raciale.

vendredi 20 février 2009

Le calme après la tempête

Avec toute la lourdeur de sa démarche, Besson aura au moins eu le mérite de susciter des réponses (notamment celle de Maitre Eolas donc) qui permettent de bien recentrer le débat sur le téléchargement d'oeuvres audio ou vidéo sur Internet.

Le vent a soufflé dans tous les sens, il s'agit maintenant de trouver une approche constructive. Mon point de vue ici a toujours consisté à dire que, pour commencer, le cinéma coûte trop cher : combien de couples ai-je entendu se plaindre que pour emmener leurs enfants un dimanche c'est tout de suite 50 euros déboursés, donc de plus en plus exceptionnel comme dépense. Or le cinéma ne peut pas fonctionner sur quelques films familiaux dans l'année, quelques blockbusters américains, un Grand Bleu (8 millions d'entrées en 88) les années bissextiles et un Ch'ti tous les 40 ans.

L'arbre qui cache la forêt a été la sortie de la carte UGC et la généralisation des formules d'abonnement à l'année. Pour une vingtaine d'euros par mois on peut donc aller voir autant de films que l'on veut dans un certain circuit de salles. A côté certains peuvent aussi avoir des places à moins de 5 euros par leur comité d'entreprise, mais s'ils perdent leur job, comme beaucoup de gens en ce moment, ils doivent alors payer plein pot (8 à 10 euros !). Ce que les chiffres de la fréquentation ne disent pas c'est que de moins en moins de français vont au cinéma. Ceux qui ont une carte, eux, y vont au moins 3-4 fois par mois, mais ils sont une population limitée avec une carte illimité.

Le mot d'ordre dans les années 90 était à la modernisation du parc de salles. Concrètement il s'agissait de bâtir puis d'amortir des grandes surfaces du cinéma. Aujourd'hui que la plupart des multiplexes sont amortis, il ne faut évidemment pas compter sur UGC ou Pathé/Gaumont pour baisser leur marge d'exploitation. J'ai souvent mentionné l'anecdote des tarifs agressifs lancés à Lyon à l'été 1994 (et dans d'autres villes aussi à l'époque) avec la place à 10 francs, à peine plus d'1,50 euros ! Les salles étaient prises d'assaut, comme pendant la Fête du Cinéma d'ailleurs, qui ne profite qu'à une poignée de films qui se pressent de sortir fin juin). Il n'y a pas eu besoin de tribune dans Le Monde : tout c'est passé en coulisses et les (trop) audacieux exploitants ont été remis dans le droit chemin, pour le bien commun du 7e Art...

Ce qui se passe aujourd'hui avec Internet suit le même monologue pontifiant sur la défense des artistes, mis en scène par ceux qui font travailler les artistes (et qui leur soumettent une pétition de temps en temps). A Besson qui compare d'un bloc pirates/hébergeurs/régies pub/annonceurs à des dealers, je propose une bien meilleure analogie éditeur/proxénète (Desproges l'utilise dans son réquisitoire contre l'éditeur André Balland - 4/11/82). L'hypocrisie est moins directe pour Besson qui met son nom sur la majorité des scénarios Europacrap (à noter qu'il n'y a que 1% de charges patronales sur les contrats d'auteur), il n'empêche que c'est le même raisonnement. Luc Besson, comme Universal, Pathé et tous les éditeurs audio/video se sont gavés pendant des années. Le DVD a été une manne incroyable. Coût de production/distribution/promotion 2-3 euros (5 euros pour des éditions spéciales) et marge nette de 70%. Seuls les parfums font toujours mieux avec 90-95% !

Aujourd'hui le DVD est clairement une technologie en fin de vie, Maitre Eolas rappelle qu'elle a 14 ans (la VHS a eu une existence mass market de vingt ans), mais les éditeurs ne peuvent pas supporter cet état de fait. Comme ils ne peuvent pas changer l'ordre de leurs idées ils veulent changer la loi. Exactement comme des sales gosses, mauvais perdants, qui s'énervent et commencent à tricher, à faire des coups bas. J'appelle ça le syndrome de l'oncle Picsou.

LE CINEMA SEUL FACE A INTERNET

Maintenant, inconsciemment ou pas, ils ne se sentent peut-être pas prêts à répondre à la pression technologique venue d'Internet. La seule réaction censée de leur part serait de revoir tout le pricing de la chaîne, depuis la sortie en salle jusqu'aux téléchargements. Un plein tarif au guichet couterait 5 euros. 2-3 mois plus tard le DVD collector serait à 10 euros ou 3-5 euros pour une édition basique. En même temps le téléchargement du film seul serait proposé à 3 euros (càd 2,99 euros).

Très compliqué de faire comprendre ça à ces têtes de lard. Ils campent sur leurs positions, leurs gros comptes en banque et leurs petits pouvoir de PDG à paillettes. Ils préfèrent retarder l'avènement d'une offre de téléchargement simple et ouverte qui serait une telle innovation commerciale qu'elle ébranlerait leurs beaux chateaux de cartes hérités du siècle passé.

Ce qui leur pend au nez : une offre va finir par émerger. Ils ne seront pas préparés et ils vont devoir courir derrière, dépensant beaucoup plus d'énergie et d'argent que s'ils se mettaient au travail sérieusement tout de suite et arrêtaient d'essayer d'allumer des contre-feux avec des pétards. Je remarquais le mois dernier que ça fera 10 ans en 2009 que le Projet Blair Witch est sorti sans qu'un autre film ne fasse autant de bruit sur Internet. Hé bien, je suis prêt à parier que le prochain fera tellement de bruit sur Internet qu'on n'entendra plus Besson grommeler que lui, il est un pauvre artisan du 7e Art, et que ce qu'il aime avant tout c'est donner beaucoup bonheur aux gens.

jeudi 19 février 2009

Oscar du pire scénario à Besson pour "Les Pirates de l'Apocalypse"

Maitre Eolas répond point par point à Besson. On ne peut pas mieux faire !

"Il faut donc étendre la loi à ce cas et poursuivre les dealers."

Mais la loi s'étend déjà sur eux. Et au fait, je croyais que c'était des voleurs ? C'est des dealers, maintenant ?

"Notons que ces derniers ne seront pas difficiles à identifier : ils sont connus de tous. Une loi qui sanctionnerait les voleurs sans punir les responsables de ce trafic illicite serait une loi injuste. Quelle nation accepterait de punir sévèrement les consommateurs de drogues tout en laissant leurs dealers prospérer tranquillement ?"

Ah oui, ce sont des dealers. Des dealers qui donc voleraient de la drogue pour la distribuer gratuitement à leurs clients, en se finançant en mettant de la pub sur leur T-shirt et leurs pochons de drogue ?

Bon, admettons. Ça devient compliqué, cette histoire. Mais alors, dans ce scénario, le producteur de drogue, c'est qui ?

Mais… c'est toi, Luc, non ? Ah, que c'est délicat de filer des métaphores ! Mais note bien que je crois que tu as mis le doigt sur quelque chose. Car l'industrie du cinéma comme celle de la musique d'ailleurs, repose effectivement sur des comportements analogues à ceux des dealers : on crée un besoin pour hameçonner le client (bandes-annonce, matraquage publicitaire, clips alléchants sur toutes les chaînes visant le public cible) et quand il est accro, on l'oblige à payer pour l'assouvir (la place de cinéma à 10 euros, puis le DVD à 30 euros, le pay per view à 3 euros, sinon il y aura le passage à la télévision… financé par la pub ; la place de concert à 50 voire 100 euros, l'album à 25, la sonnerie à 2 euros, le single à 1 euro lisible sur un seul lecteur compatible). Sachant qu'une grande partie de la clientèle cible est mineure.
En bonus à la fin du post, une vidéo de Mozinor qui vise juste notre producteur phare qui réinvestit son pognon dans les films par pure passion pour son Art.

Et puis un petit coup en passant sur Freddy Lefebvre, comme toujours bien mérité :Tout le monde n'a pas le talent de Luc Besson.

(merci à Tristan Nitot d'avoir signalé ça sur son blog)

mercredi 18 février 2009

Désarmorcer une critique prout-prout pour les nuls

A défaut d'une meilleure appellation j'appelle critique prout-prout le papier qui se sent obligé de trouver des arguments pour aimer un film, la bouche en cul de poule. Prout prout. Aucune sincérité donc, aucune spontanéité, et cela se voit tout de suite dans les tournures raides qu'ils empilent laborieusement. Si c'est inconscient, tout ça est bien révélateur ; conscient ou pas, de toute façon cela rejoint ma thèse selon laquelle les critiques voient plus les films par obligation professionnelle que par envie.

L'exemple du jour (ils sont légions dans l'ensemble de la presse qui se veut de qualité et héberge donc ces intermittents de la paraphrase verbeuse) est attrapé de volée à l'étalage Télérama. La critique favorable commence par cette phrase :
S'il y a bien un défaut qui ne peut être reproché à François Ozon, c'est le manque d'audace.
Vous remarquerez sans doute qu'on démarre sur le ton de la justification : le parti-pris de défense du réalisateur est flagrant. Je ne la critique pas en tant que telle, mais s'il y a lieu, elle doit venir après l'exposé d'arguments étoffés. Au lieu de ça, admirez la tournure de lieu commun, on se croirait dans une dissert de lycéen (pas payé pour écrire des conneries, lui) timide et peu inspirée "De tous temps le François Ozon a été reconnu pour son dévouement indéfectible et protéiforme au Septième Art." D'accord, j'en rajoute dans le côté pompeux tendance aChiers du Cinéma alors que, pour rester honnête, Télérama donne rarement là-dedans (de mémoire, Pierre Murat se la pète grave "moi on me la fait pas avec tous les films que j'ai vus").

Si cette première phrase pue le lieu commun, ce n'est pas juste par manque de style du plumitif de garde (Samuel Douhaire, puisqu'il faut l'appeler par son nom), non. Je ne vais pas m'amuser à citer l'Art Poétique de Boileau, puisqu'on est à des lieux de toute velléité de faire des phrases bien tournées, mais quand un film nous inspire on sait trouver les mots pour le défendre. On ne fait pas des phrases poussives, on ne commence pas par une constatation d'une banalité écrasante. Les mots ne mentent pas. S'il ne viennent pas c'est qu'on n'a rien à dire d'intéressant sur le sujet.

Je ne vais pas analyser phrase par phrase la médiocrité du truc, il y a déjà suffisamment de paraphrase dans les critiques de ciné, mais je vais quand même attraper un exemple plus loin dans le développement scolaire et servile du préposé aux alinéas :
Le pari, gonflé, de ces ruptures de ton a de quoi dérouter. Il séduit le plus souvent, comme lors de la fugue, très drôle, du bébé dans un supermarché.
Notez la double mise en exergue de qualificatifs suffisamment vagues pour être pipeau (gonflé, très drôle) comme cette structure parallèle qui sent trop l'échafaudage pour respirer la sensation saisie à vif. Et en paraphrase d'un exemple visuel : quelle médiocrité journalistique !

En revanche la critique défavorable, comme c'est souvent le cas, ne s'encombre pas de tournures alambiquées avec enjoliveurs bling-bling. Tout est très direct, Juliette Bénabent ne commence pas sur une mise en perspective bateau-mouche de la carrière d'Ozon (elle ne part pas avec l'a priori d'être indulgente avec lui) mais le problème du mélange des genres dont se croit capable le cinéaste. Elle dit simplement pourquoi ça ne marche pas, selon elle, là où son collègue des chiens écrasés force ses mots entre deux accès de paraphrase empesée.

Verdict sur Ricky à la simple lecture de ces critiques : les seuls arguments objectifs sont dans le papier négatif. Il y a de très grandes chances que le film soit mauvais (tout en se prenant très au sérieux, comme souvent chez Ozon). Vous avez gagné le droit d'aller tenter votre chance avec d'autres films.

mardi 17 février 2009

Le pet foireux du papillon

Après que Groluc est sorti de sa tanière pour tonner contre la France, pays où le vol par internet est le plus répandu, que toto Lefebvre lui ait sucé la roue, faisant de la pub au passage à un autre site, AlloStreaming, il apparaît que, malgré tout, la Culture l'a échappée belle.

Imaginez que le très haut débit soit répandu comme dans les pays nordiques de 50 à 70% de la population, au lieu des pitoyables 4,4%... Besson noircit le tableau, trouvant bien évidemment rapidement un politico bourré de convictions personnelles pour embrayer, mais il a bien de la chance. Jusqu'à présent le très haut-débit est mal vendu, souvent trop cher (40 euros mini chez Numéricable, quel avantage concret par rapport aux 30€ d'un abonnement ADSL) : tiens-tiens, ça me rappelle les places de ciné trop chères, les DVDs trop chers, le salaire de Groluc qui émarge sur tous les scénarios Europacrap.

Personne ne demande à des agents comptables de comprendre le fonctionnement d'Internet et de ne pas le réduire à un centre de coûts, un outil de promotion. Mais s'ils aiment les chiffres à ce point, ils n'auront jamais le temps d'être déçus. En revanche ils seront bien seuls.

lundi 16 février 2009

Besson la vieille Garde

Je me permets ce genre de titre parce qu'il me rappelle le terrorisme verbal des "jeunes turcs" des Cahiers du Cinéma pour couper des têtes à l'abri de leurs plumes, avant de montrer les crocs derrière la caméra avec plus ou moins de bonheur pour le cinéma français.

Besson au moins ne s'est jamais réclamé de la Nouvelle Vague. De plus il a toujours dit qu'une fois qu'il aurait fait sa petite dizaine de films il aurait tout dit. Honnête, non ? Ses films (disons jusqu'à Jeanne d'Arc) n'ont pas la prétention d'avoir un message super important à faire passer, ils sont juste très bien réalisés et touchent une grande majorité de spectateurs. Ce sont justement des films qui permettraient aujourd'hui de ramener pas mal de monde vers les salles obscures, n'en déplaise aux critiques qui préfèrent regarder de haut le manque de maturité au centre de tels films. Et alors? Spielberg tombe aussi dans le sentimentalisme d'un Capra laborieux, on ne va pas exiger de Besson de faire moins puéril alors qu'il ne tourne (presque) plus.

Et puis Besson est devenu un businessman, si je ne m'abuse, au moment où il s'est rendu compte qu'il ne devait plus rien aux incompétents de Gaumont, après Le 5e élément. Spielberg s'est pris quelques gamelles (Sugarland Express, 1941, Always...) qui lui ont évité d'avoir l'ego surchargé. Il côtoie en plus des talents à sa mesure dans différentes branches. Besson lui est seul et avant de monter EuropaCrap il n'avait jamais connu le moindre échec. Hier, Besson mettait un petit coup de pression aux hommes politiques en publiant, comme il le fait de temps en temps, son opinion dans un grand canard.

A lire le diatribe de Luc Besson, on se dit qu'à peu de choses près on a échappé à Eric Besson chargé de l'économie numérique, avec le zèle de fonctionaire de Vichy qu'il déploie aujourd'hui dans son ministère du nettoyage à sec des Valeurs Travail-Famille-Patrie. Luc Besson veut nous faire pleurer en parlant de pays des droits de l'homme qui bafouerait ses droits d'auteur. Hé oui ma petite dame, les temps sont dûrs pour tous le monde, même pour les multimilionnaires...

Alors certes ce n'est pas le propos de minimiser la question du téléchargement illégal (je me batrais jusqu'à la mort pour qu'on n'emploie pas le mot piratage à toutes les sauces), mais justement il ne s'agit pas de défendre une "culture gratuite". Il n'y a pas de culture gratuite tout simplement parce que la culture n'est pas quelque chose de passif où il suffit de se servir. Et ce n'est pas plus vrai si on veut fixer un prix d'entrée à la culture. Certes il y a des produits dérivés de la culture, mais cette culture, justement, devrait permettre aux gens de comprendre que le cinéma est au-dessus du DVD par exemple. Aujourd'hui les gens sont lassés des DVD, ils voient bien que le format est mort, ils ne sont pas pressés de passer au BluRay. L'offre est pléthorique, mais rien ne se dégage de la masse. Cette dictature de la conformité s'achève selon le principe de la longue traîne sur Internet et la possibilité de choisir, pour chacun, au plus près de ses affinités. Et là il se trouve qu'il y a un grand fossé entre les modèles vieillissants de la TV et le foisonnement anarchique sur Internet.
Aujourd'hui ce sont les ados et les jeunes adultes qui téléchargent, parce que c'est eux les plus à l'affût du toujours nouveau, du toujours plus. Une partie de leur consommation d'Internet échappe donc à la récupération commerciale et c'est ça qui fait enrager ceux qui croyaient détenir les clés du parc d'attraction. Ce n'est pas en se focalisant sur les resquilleurs que le problème va changer.

Internet aura toujours raison, quelle que soit l'agressivité de Groluc. S'il produit demain le film qui va venir titiller les Ch'tis au box-office, est-ce qu'il va venir pleurer sur les centaines de milliers de téléchargements induits ? Il en serait bien capable, et donc incapable de comprendre qu'un film passé inaperçu n'a rien à perdre à être téléchargé presque gratuitement.
Je dis presque parce qu'il faut du temps pour le télécharger puis pour le voir. Et il n'y a pas que le temps de monsieur Besson qui vaut de l'argent.

mardi 10 février 2009

Firefox in Motion

Pour donner un contrepoint au billet précédent :
Internet is about people before being about hi-technology.
(Plein écran/Fullscreen HD)

Signes avant-coureurs

Deux anecdotes très similaires, glanées à quelques semaines d'intervalle sur le web :
    TRON (1982) : de nombreux dessinateurs du département animation de Disney refusent de participer à ce film où les ordinateurs génèrent l'essentiel des images (le film ne marche pas). En 2004 Disney arrête les dessins à la mano pour tout passer en CGI.

Bref, quand une nouvelle technologie se manifeste à l'horizon, ça veut dire qu'on a encore un peu de temps pour évoluer de notre côté. Trop, certainement, par rapport aux certitudes et aux habitudes acquises, mais au moins on est prévenu.

lundi 9 février 2009

Stanley Kubrick's boxes

Leloup me signale ce documentaire de Jon Ronson diffusé le mois dernier sur Channel 4.
Stanley Kubrick's boxes.

Très émouvant pour tout ceux dont l'amour du cinéma s'est accru au fil de la découverte des films de Kubrick. Quiconque n'a pas été subjugué par le réalisateur, par 2001, par Orange Mécanique, par Barry Lyndon... n'y verra qu'une histoire ennuyeuse.

Evoquer Kubrick au fil de ses centaines de boites d'archives accumulées au fil des ans : l'approche archéologique demande un minimum de culture, ou juste de regarder avec des yeux d'enfant.
C'est un peu le Mystère de la Grande Pyramide. A la fin on ne sait pas trop si on doit croire aux images surnaturelles dont on croit se rappeler, ou si c'était juste un rêve, les yeux grand ouverts.

dimanche 1 février 2009

Nouvelle étude dans le sens du P2P

Le blog Linux Mint me signale cette news publiée sur Ars Technica : une étude du gouvernement hollandais montre que le Peer-to-peer a, au global, un effet positif.

Ce n'est pas une étude de plus d'un organisme quelconque, c'est vraiment une étude officielle où l'indépendance est un condition de départ. Evidemment dans certains Etats européens où les lobbies de l'édition audiovisuelle (cela inclut les obscurs ministères chargés du recouvrement des royalties comme la Sacem en France), une étude indépendante a peu de chance de voir le jour. En France on fait des commissions avec des personnes qui ont partie liée avec les différents acteurs de l'industrie. En Hollande l'étude n'est pas biaisée dès le départ en incluant les mots "pirates" ou même "téléchargement illégal", non, on fait une vraie étude neutre sur le téléchargement au sens large, avec contrepartie monétaire ou pas.

La conclusion du rapport montre enfin une analyse économique étendue des effets du téléchargement, pas une compilation assourdissante de modèles hasardeux pour l'évaluation d'un manque à gagner.
The study concludes that the effects are strongly positive because consumers get to enjoy desirable content and also get to keep their cash to buy other things. Because the consumers save much more money than the producers lose, the net economic effects are positive. The report also reinforces the truth that unpaid downloads do not translate into lost sales in anything close to a one-to-one ratio.

Enfin une étude neutre, approfondie et parfaitement éclairée dans le bon sens de l'évolution technologique et économique !

mardi 27 janvier 2009

Signaux de fumeurs

Pourquoi autant de bons documentaires viennent des US ? (je parle de documentaires qui ne font pas juste joli, mais aborde des questions politiques ou socio-économiques)
Parce qu'il suffit de se baisser pour ramasser un sujet tellement riche qu'on peut pas se tromper. D'ailleurs il suffit de pousser un peu pour en tirer une fiction (pitié, pas Révélations...).

Il y a 15 ans plusieurs états des US avaient déjà interdit de fumer dans les lieux publics. Suivant l'humeur locale fumer dans la rue ou dans un jardin public pouvait donc être passible d'une amende (voire de prison si on compte les outrages à agents provoqués).

Maintenant, ça y est, il est même interdit de fumer chez soi !

Il ne reste plus qu'à créer un secrétariat d'Etat de l'immigration et de la santé nationale (et du co-développement des mes bronches) pour organiser des charters afin que les rebelles puissent aller fumer librement au Mexique, tout en continuant d'acheter leurs clopes aux US.

dimanche 25 janvier 2009

Privé de copie

Méfions-nous toujours de ces entrepreneurs très sûrs d'eux qui se mettent en scène comme des défenseurs de la liberté du consommateur. M-E Leclerc vient régulièrement faire l'hypocrite dans les médias pour dire combien il lui est dur d'être obligé de faire d'aussi grosses marges à cause de la loi qui l'empêche de vendre moins cher.

Et puis plus dans l'actualité éphémère du web, il y a Wizzgo. Les créateurs se sont vus très malins avec le lancement d'un magnétoscope universel en ligne. M6, TF1 leur tombent dessus et ils viennent pleurer, lancent une pétition (ah la démagogie, toujours !), se présentent comme un service innovant qui va résoudre le problème du téléchargement illégal... Rien que ça. Malheureusement, comme l'expliquait en détail il y a 15 jours le scénariste John August sur son blog (Cablevision and the Infinite TiVo), le concept reviendrait à institionaliser le téléchargement aux mains de ces fournisseurs de service tout puissants.

Pour résumer, Cablevision (ou Wizzgo) proposent un service de magnétoscope en ligne, donc à partir d'un certain nombre de clients ils sont obligés de tout enregistrer. Ils constituent ainsi une gigantesque bibliothèque des programmes TV au fil du temps sur laquelle ils n'ont aucun droits. Comment peut-on imaginer qu'ils vont en rester à un service limité quand leur catalogue devient illimité ? Qui peut les empêcher de commencer à mettre en place des abonnements pour rattraper les programmes de la veille, qu'on a oublié "d'enregistrer", c'est à dire d'en soliciter à l'avance la disponibilité différée ?
Les catalogues de contenus sont le nerf de la guerre, c'est le seul bien qui permet un revenu récurrent avec des frais de structure forfaitaires. Qui peut être assez naïf pour croire que des propriétaires vont se laisser déposséder ? A l'heure où les chaines commencent à peine à monétiser leur offre de "catch-up" TV ?

Ceci étant, entre la fin de la pub en Prime Time sur le service public et la crise qui va faire chuter les budgets pub au sens large, la bataille de la pub sur le web ne fait que commencer.

mercredi 21 janvier 2009

Cinema & Internet : bilan 1999-2009

2009 marque les 10 ans du Projet Blair Witch, un exemple de promotion internet parfaitement maitrisée pour faire monter les attentes sur un film à très faible budget, un modèle qui a fait et fait toujours saliver beaucoup de marketeurs de l'industrie. Pourtant on ne peut pas dire que d'autres exemples marquants soient venus s'inscrire dans cette lignée. J'oublie certainement un ou deux exemples ayant tenté quelque chose, mais ce qui est sûr c'est qu'aucun phénomène ne s'est imposé comme la nouvelle référence, faisant preuve de plus d'inventivité, ou à défaut, d'efficacité, que The Blair Witch Project.

Si l'on considère la vitesse à laquelle évolue internet, et à laquelle internet permet à des secteurs d'activité d'innover, c'est vraiment étonnant. En y regardant d'un peu plus près, pas tant que ça. En effet, il apparait évident qu'Internet fait plus peur à l'industrie du cinéma (et du disque) qu'elle ne l'a motivé à essayer de nouvelles pistes, voire des approches radicalement différentes dans la manière de penser leur business. Cette approche conservatrice se résume à l'association des mots "pirates" et "internet" dans le contexte de la diffusion audiovisuelle depuis 10 ans. Je me suis déjà suffisamment étendu ici sur la propagande et le lobbying d'une industrie qui perd complètement contact avec la réalité socio-économique, pas la peine d'en rajouter une double-couche. L'actualité se suffit à elle-même :
Selon le CNC, un film qui a ammassé 10 millions de d'entrées au cinéma peut espérer se vendre à 2 millions d'exemplaires en France. Impact du piratage, ou non, seulement 970.000 DVD des Bronzés 3 ont été vendus. Ainsi, un acte anodin, toléré chez TF1, est à l'origine de cette affaire. Studio Canal, également intéressé dans cette affaire, estime le manque à gagner à 12 millions d'euros et met le flop du DVD directement sur le dos du piratage. Surtout qu'il est très rare que dans ce genre d'affaires, on réussisse à remonter jusqu'à la source du fichier incriminé. Autant dire que tous les defenseurs des ayants-droits étaient très remontés.
>> article complet sur PCworld
Toujours la même histoire de Picsou viscéralement attaché à son premier dollar et la recherche de bouc émissaires. C'est la même hypocrisie (complètement intériorisé dans le milieu) qui fait se balader une célébrité seins nus sur la plage et porter plainte contre les tabloids pour toucher des sous, puis vendre l'exclu de ses photos de mariage à un magazine.

Le potentiel d'Internet est énorme, depuis dix ans un barrage (de communiqués de presse, de lobbying, de bourrage de crâne) a été construit et colmaté. Des vannes (VOD essentiellement) ont été, tant bien que mal, installées. Mais elles sont sous-dimensionnées par rapport à la pression de l'Internet. Le barrage déborde largement et continuellement parce que la répression ne peut pas tenir le rythme de l'évolution sur le web compte tenu de la timidité qu'elle a induit dans les offres payantes (on commence juste à abandonner les DRM sur la musique, pas pour les films...).

Le gros danger est pour les salles parce qu'une des raisons majeures au téléchargement illégal est le prix d'une place de ciné. Les cartes d'abonnement cachent complètement le mouvement de fond qui éloigne l'individu moyen des salles. Les encartés sont en majorité les mêmes qui téléchargent (ou ont des amis qui téléchargent, le résultat est le même). La crise ne va faire qu'accélérer le mouvement, mais quel circuit est susceptible de faire une révolution ? C'est totalement improbable puisque toute la chaîne est sclérosée (cf. l'étouffement des tentatives locales d'un ticket à 10FF en 1994). Quelque part il faut peut-être que les multiplexes se cassent la gueule pour que de vraies salles de cinéma ouvertes à tous se remettent à exister.

lundi 12 janvier 2009

Claude Berri (1934-2009)

Une pensée pour celui qui fût, pour moi, le producteur emblématique du cinéma français, capable d'exprimer lui-même sa sensibilité derrière la caméra (alors qu'il avait commencé avec l'ambition de devenir comédien) et de passer des films des Charlots à Tess, Jean de Florette, Germinal...

Au contraire, son ancien partenaire Christian Fechner, disparu il y a tout juste 1 mois 1/2, n'avait jamais réussi à montrer qu'il pouvait passer des Charlots à des films plus ambitieux (disons moins méprisés par la critique) avec le même succès public.

Le flair de Claude Berri l'avait amené il y a un an à produire Bienvenue chez les Ch'tis. Avec le succès, enfin, de son fils Thomas Langmann comme producteur de Mesrine, je veux imaginer qu'il a vécu sa dernière année comme un accomplissement, un aboutissement dans son travail et malgré les regrets sur l'éducation de ses fils qu'il nous livrait dans son autobiographie.

La distribution P2P : directement du producteur au consommateur

Trent Reznor (Nine Inch Nails) annonce une jolie perf en termes de ventes : en têtes sur Amazon.com après avoir claqué la porte d'Universal pour mettre son nouvel album, en partie gratuitement, disponible sur les réseaux d'échange P2P.

Si les maisons de disque crient si fort (mais elles finissent par se fatiguer, quand même, à force de courir derrière une cible 10x plus rapide et évolutive qu'elles) c'est bien parce que désormais elles n'auront plus le monopole de la commercialisation des titres.

Pour le cinéma c'est plus compliqué, parce qu'il y a les salles. Mais attendez que le prochain grand réalisateur sorte ses films (courts ou moyen) sur internet et ridiculise, en terme d'audience, les blockbusters obnubilés par la barrière des $100m de box-office.

samedi 10 janvier 2009

John Barry

Jane Birkin, alors deuxième femme de John Barry (1965)

Puisqu'il n'y a pas de raison d'attendre que les gens soit morts pour leur rendre hommage : John Barry a eu 75 ans l'an dernier et c'est un des plus grands compositeurs de musique de films. L'édition Vanity Fair de février fait donc un petit article gentil, mais sans même une accroche en couverture...
Barry had made a key contribution to the first Bond movie, Dr. No, as the arranger of the famous “James Bond Theme,” giving it the nasty, knife-like guitar sound and the big-budget brassiness which can still get an audience’s pulse going and which continues to define the series aurally.
Officiellement oui, Barry est juste l'arrangeur du célèbre thème. Ne roulant pas sur l'or et les Oscars à l'époque, il avait accepté en sous-main d'apporter ce dont le compositeur de Dr. No, Monty Norman, s'était montré incapable. Sur ce boulot ingrat il s'est assuré le job de compositeur pour presque tous les 007 depuis le deuxième film, Bon baisers de Russie (1963), jusqu'au n°15 Tuer n'est pas jouer (1987), ce qui n'a permis de lancer son impressionnante carrière.
Pour l'anecdote, un procès a manqué de démontrer officiellement que John Barry était l'auteur à part entière du thème de James Bond, mais en lisant le compte-rendu il n'y a aucun doute. D'ailleurs qui se souvient aujourd'hui de Monty Norman, hormis les inconditionnels de 007 et les fans d'anecdotes de ciné ?

Pour aller plus loin dans l'anecdotique, John Barry avait notamment un homonyme assez fameux comme Production Designer puisqu'il avait travaillé sur De l'or pour les braves, Orange Mécanique, Star Wars, Superman I et II avant de mourir subitement d'une méningite infectieuse. Moins célèbre, mais pas moins reconnu par la profession, ce qui permet de tracer une ligne entre ce que les spectateurs peuvent distinguer en termes de talent dans une production, et les métiers de l'ombre.