Je me permets ce genre de titre parce qu'il me rappelle le terrorisme verbal des "jeunes turcs" des Cahiers du Cinéma pour couper des têtes à l'abri de leurs plumes, avant de montrer les crocs derrière la caméra avec plus ou moins de bonheur pour le cinéma français.
Besson au moins ne s'est jamais réclamé de la Nouvelle Vague. De plus il a toujours dit qu'une fois qu'il aurait fait sa petite dizaine de films il aurait tout dit. Honnête, non ? Ses films (disons jusqu'à Jeanne d'Arc) n'ont pas la prétention d'avoir un message super important à faire passer, ils sont juste très bien réalisés et touchent une grande majorité de spectateurs. Ce sont justement des films qui permettraient aujourd'hui de ramener pas mal de monde vers les salles obscures, n'en déplaise aux critiques qui préfèrent regarder de haut le manque de maturité au centre de tels films. Et alors? Spielberg tombe aussi dans le sentimentalisme d'un Capra laborieux, on ne va pas exiger de Besson de faire moins puéril alors qu'il ne tourne (presque) plus.
Et puis Besson est devenu un businessman, si je ne m'abuse, au moment où il s'est rendu compte qu'il ne devait plus rien aux incompétents de Gaumont, après Le 5e élément. Spielberg s'est pris quelques gamelles (Sugarland Express, 1941, Always...) qui lui ont évité d'avoir l'ego surchargé. Il côtoie en plus des talents à sa mesure dans différentes branches. Besson lui est seul et avant de monter EuropaCrap il n'avait jamais connu le moindre échec. Hier, Besson mettait un petit coup de pression aux hommes politiques en publiant, comme il le fait de temps en temps, son opinion dans un grand canard.
A lire le diatribe de Luc Besson, on se dit qu'à peu de choses près on a échappé à Eric Besson chargé de l'économie numérique, avec le zèle de fonctionaire de Vichy qu'il déploie aujourd'hui dans son ministère du nettoyage à sec des Valeurs Travail-Famille-Patrie. Luc Besson veut nous faire pleurer en parlant de pays des droits de l'homme qui bafouerait ses droits d'auteur. Hé oui ma petite dame, les temps sont dûrs pour tous le monde, même pour les multimilionnaires...
Alors certes ce n'est pas le propos de minimiser la question du téléchargement illégal (je me batrais jusqu'à la mort pour qu'on n'emploie pas le mot piratage à toutes les sauces), mais justement il ne s'agit pas de défendre une "culture gratuite". Il n'y a pas de culture gratuite tout simplement parce que la culture n'est pas quelque chose de passif où il suffit de se servir. Et ce n'est pas plus vrai si on veut fixer un prix d'entrée à la culture. Certes il y a des produits dérivés de la culture, mais cette culture, justement, devrait permettre aux gens de comprendre que le cinéma est au-dessus du DVD par exemple. Aujourd'hui les gens sont lassés des DVD, ils voient bien que le format est mort, ils ne sont pas pressés de passer au BluRay. L'offre est pléthorique, mais rien ne se dégage de la masse. Cette dictature de la conformité s'achève selon le principe de la longue traîne sur Internet et la possibilité de choisir, pour chacun, au plus près de ses affinités. Et là il se trouve qu'il y a un grand fossé entre les modèles vieillissants de la TV et le foisonnement anarchique sur Internet.
Aujourd'hui ce sont les ados et les jeunes adultes qui téléchargent, parce que c'est eux les plus à l'affût du toujours nouveau, du toujours plus. Une partie de leur consommation d'Internet échappe donc à la récupération commerciale et c'est ça qui fait enrager ceux qui croyaient détenir les clés du parc d'attraction. Ce n'est pas en se focalisant sur les resquilleurs que le problème va changer.
Internet aura toujours raison, quelle que soit l'agressivité de Groluc. S'il produit demain le film qui va venir titiller les Ch'tis au box-office, est-ce qu'il va venir pleurer sur les centaines de milliers de téléchargements induits ? Il en serait bien capable, et donc incapable de comprendre qu'un film passé inaperçu n'a rien à perdre à être téléchargé presque gratuitement.
Je dis presque parce qu'il faut du temps pour le télécharger puis pour le voir. Et il n'y a pas que le temps de monsieur Besson qui vaut de l'argent.
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