Errol Morris publiait hier une enquête détaillée au coeur de son dernier documentaire, Standard Operating Procedure, sur le traitement des prisonniers à Abu-Ghraib.
[Allo Cannes, ya qq1 pour sortir le film en France ?]
Le point de départ est à lui seul vraiment passionnant sur la question de la construction cinématographique. Errol Morris hésite sur la manière de juger un personnage clé du documentaire, Sabrina Harman. Parce qu'avec un film on juge des personnages, des personnages bien réels dans le cas d'un documentaire. Son oeil, son âme de cinéaste le pousse à creuser, à voir plus loin que les évidences qui semblent s'imposer d'elles-mêmes, comme le personnage du Juré n°8 dans Douze hommes en colère. Au contraire son monteur s'impatiente. Il est habitué à juger les images rapidement : ce plan est bon, celui-là non, là ça colle, là non, etc. Pour le monteur les images parlent d'elles-mêmes, elles n'ont pas de secret... et c'est là le petit côté présomptueux des monteurs, évident surtout quand on leur demande de remonter une scène pour plus coller à une logique narrative plus large que celle de cette scène callée sur un rythme technique qui met seulement en valeur le meilleur des rushes.
Bref Errol Morris nous détaille sa démarche et c'est passionnant. Ah ! si les cinéastes de fiction pouvaient être aussi consciencieux lorsqu'ils mettent en scène la violence et qu'ils appliquent une morale par-dessus...