mardi 28 avril 2009

William Morris + Endeavor = Will MorE?

Article pas très intéressant en soit (simple juxtaposition de déclarations à chaud sans travail de mise en perspective) mais qui illustre les changements que vont subir les professions intermédiaires des médias.
Mr. Emanuel, whose brother Rahm is the White House chief of staff, told agents who flocked to his office that the weak economy was a major impetus to consolidation.
Entre deux répétitions de détails sans importance sur la nouvelle organisation des 2 "majors" de la représentation de talents William Morris + Endeavor, il est vaguement évoqué l'opportunité de "rationaliser" en période de crise. Par la bouche du charismatique frère de celui qui joue le rôle du "méchant" à la Maison blanche, ça passe mieux.
For years, virtually every significant Hollywood agency has explored possible mergers with competitors as companies looked for growth and new horizons at a time when core movie and television businesses have been constrained by digital inroads and cost cutbacks.
A l'heure où les banquiers recommencent à se sucrer, grâce à l'argent des contribuables, la "crise" pousse un peu les agents artistiques à prendre en compte les mutations plus profondes de l'économie numérique, et notamment le fait que les intermédiaires vont devoir travailler beaucoup plus pour justifier leurs 10% de commission sur tout ce qui bouge.
Ou alors, les agences rationalisées vont se concentrer sur les gros coups, laissant la place à un nouveau marché pour des "offres" alternatives. Ce serait pas mal aussi.

lundi 27 avril 2009

Epuration ou réconciliation numérique ?

Aujourd'hui, très belle réponse du berger aux mégères malaprises qui s'énervaient la semaine dernière contre le vote du PS pour repousser Hadopi (voir post du 22/4).

La réponse est complète, argumentée sans passion contrairement à ces pauvres cinéastes déconnectés qui prennent encore leur position dans la société au sérieux.
La loi censée défendre l’exception culturelle devient une « loi d’exception » en Europe. Dès lors, en refusant le fait du prince, comme nombre de députés de la majorité, nous ne comprenons pas en quoi nous devrions demander pardon aux artistes qui nous ont toujours trouvés à leurs côtés dans l’action gouvernementale comme dans nos politiques locales. Nous voudrions juste que ceux qui nous interpellent prennent conscience que voter une loi est un acte plus grave que de signer une pétition. C’est un engagement au service de l’intérêt général dont on doit répondre la tête haute, sans raser les murs.

Lorsque la loi est mal foutue et qu’elle ne règle rien, il vaut mieux que la main du législateur tremble et qu’elle refuse de céder à la politique de « l’Hadopire ». On nous rétorque qu’il n’y a pas d’alternative. On refuse même de débattre de notre proposition de « contribution créative » au prétexte qu’elle ne serait pas à la hauteur des enjeux financiers du téléchargement. De qui se moque-t-on  ? La redevance de deux ou trois euros mensuels que nous proposons couplée à la réorientation de la taxe sur les FAI générera près d’un milliard d’euros pour rémunérer chaque année les droits d’auteurs, quand Hadopi ne leur rapportera pas un centime. Elle est aussi l’occasion de forcer un dialogue, sans haine, sans anathème, auquel se refusent aujourd’hui l’Etat et les majors, sur les coûts de fabrication et de diffusion des produits culturels.

Forcer le dialogue, rentrer dans le détail de la ventilation des bénéfices créés par les produits culturels, voilà ce que les puissants intermédiaires de la Culture veulent éviter à tout prix. L'apport des labels d'une Major, d'un conglomérat de production/distribution/exploitation dans le cinéma, d'une société d'auteurs... serait ridiculisé une fois mis à nu au beau milieu de l'économie numérique. Du moins dans l'état actuel de la volonté de ces brontosaures de la Culture de s'adapter.
Qu'ils meurent avec leur trésor de guerre et les souvenirs de leur rente de situation. Personne ne viendra les pleurer, ni les artistes, ni même leurs anciens actionnaires qui comprendront vite aussi où se nichent les gisements de croissance de l'économie.

mercredi 22 avril 2009

Les vieux de la veille

15j après la bataille, JJ Annaud, Philippe Lioret, Bertrand Tavernier, Danièle Thompson... publient une tribune dans Libé, pour dire quoi ? Qu'ils ne sont vraiment pas contents du vote des socialistes contre Hadopi. Ils se sentent même un peu incompris, les pauvres, eux qui croyaient que leur oeuvre avaient une dimension sociale.

C'est à dire qu'ils débarquent un peu. Le PS est à la rue depuis un sacré bout de temps, mais globalement ce n'est pas notre problème si on doit encore parler d'Hadopi. La compagnie des vieux cinéastes arrivés reproche aux députés de l'opposition de ne rien faire de constructif ? Mais alors eux aussi ils feraient mieux de proposer qqch au lieu de piquer une colère contre ce vote de détail contre Hadopi.
Et après ils s'étonnent qu'on les traite de bétail, de veaux qui suivent le lobbying de ces intermédiaires de la production qui vont mourir demain, sans qu'Hadopi n'y change rien ? Et c'est les mêmes qui mettront sans discuter leur nom sur une pétition qui parle un peu de droits de l'homme ?

Comme les hommes politiques qui soutiennent cette loi ils sont déconnectés du monde réel, ça fait trop longtemps qu'ils n'ont pas eu de fin de mois difficile. En revanche la création, l'économie de la création, la nouvelle économie/révolution numérique (cette expression date de 10 ans les gars, faut se réveiller, ça ne vient pas de commencer), les nouveaux modes de consommation, un nouveau pricing pour la nouvelle chaîne de distribution/diffusion... tout ça ils connaissent super bien, c'est des spécialistes. De sacrées têtes pour tout dire, il faudrait vraiment réfléchir à leur attribuer un Prix Nobel de l'économie, de la Paix et en créer un aussi pour le Cinéma qui porterait leur nom.

lundi 20 avril 2009

La gratuité en question

Chris Anderson, le rédacteur en chef de Wired, auteur il y a 4 ans de The Long Tail (La Longue Traîne), est donc quelqu'un qui connait un peu mieux internet que la majorité des élus qui travaillent, parfois, à le réguler (le discours du vieux sénateur républicain corrompu de l'Alaska - belle carte de visite - Internet is a series of Tubes fait encore rire 3 ans après).

Chris Anderson travaille depuis 2 ans (au moins) à son prochain livre, qui sortira en juillet, sur le phénomène de la gratuité et internet : Free: The Future of a Radical Price.

Il publiait déjà un avant goût de son travail l'an dernier, et j'ai l'impression que ceux qui étaient capables de l'entendre et de réagir à son approche n'ont pas été très enthousiasmés par la perspective d'un débat (synthèse en français ici). Il faut dire que même parmi les plus virulents détracteurs d'épiphénomènes coûteux comme Hadopi, le plus difficile à argumenter est la solution au problème du téléchargement gratuit. Parce qu'intuitivement, avec nos schémas de pensée hérités de la vieille économie, tous ces fichiers téléchargés gratuitement doivent bien correspondre quelque part à un problème, un déficit de ventes. Hé bien non justement. D'un côté il y a des adolescents qui téléchargent massivement, par ennui, par émulation..., mais leur pouvoir d'achat est de toute façon limité alors autant qu'ils participent au buzz gratuitement. De l'autre il y a les adultes qui téléchargent, mais ont, eux, plus souvent l'occasion d'acheter. Ils ne sont pas dans la situation frustrante de l'ado qui découvre tout en vrac et se noie dans la profusion incontrôlée. Les adultes ont une carte de crédit et ne sont qu'à un clic de faire un achat impulsif de tel disque ou de tel film. Sans compter que les produits dérivés non-numériques (livres, gadgets, déco...) n'ont aucune raison de marcher moins bien, au contraire.
Scenario 1: Low-cost digital distribution will make the summer blockbuster free. Theaters will make their money from concessions — and by selling the premium moviegoing experience at a high price.
Ce que nous dit Chris Anderson, en bref, c'est qu'il faut inclure la gratuité dans la manière de penser son marketing. Il a l'air en avance si j'en crois la manière dont le débat est soigneusement évité sur la place publique. Tant mieux, ça veut dire qu'on peut encore être en avance là-dessus (avis aux entrepreneurs qui voient loin) mais aussi que certains vont louper la dernière chance qui leur est offerte de prendre en marche le train de l'économie numérique (adieu veaux, vaches à lait, Sacem et compagnies craignos).

mardi 7 avril 2009

La parole est à la défonce

Dernier mot cette fois promis, et je laisse la loi Hadopi avorter dans son coin.

    2. Refusez systématiquement les Recommandés adressés à l'adresse précise qu'utilise votre FAI (conseillé précédemment par Maitre Eolas). Vous conviendrez que les recommandés sont très rarement des chèques de généreux donateurs. Si vous attendez quand même des RAR importants, ajoutez une ligne dans l'adresse de votre compte Internet (un truc anodin genre "boite n°512a") qui vous permettra d'identifier à coup sûr le farceur qui vous envoie une missive avec force formalités. Deux raisons à ça :
  • le facteur ne sera pas forcément coopératif pour vous indiquer l'expéditeur (surtout s'il vient de se taper 4 étages à pied pour avoir votre signature)
  • si vous n'êtes pas là (ou que le facteur n'a pas voulu risquer de se taper 4 étages pour rien) l'avis de passage ne mentionnera pas l'expéditeur et j'imagine que vous ne voudrez pas faire la queue 1/2h un samedi matin à votre bureau de poste juste pour avoir confirmation que vous êtes dans la base de publipostage des nouveaux emplois vieux créés par Crétine Albanel.

    Pas de bras, pas de chocolat ; pas de preuve légale d'un avertissement, pas de risque de sanction. Et qui c'est qui aura gaspillé l'argent des contribuables en touchant des sous de la Sacem et compagnie ?


Bon je vous laisse, j'ai des téléchargements en retard. Tout ce débat face à des industriels de mauvaise foi et des politiques commis d'office m'a donné une de ces soif de culture gratuite... Comme une envie de commettre un crime gratuit.

"16 gus dans un hémicycle"

Un dernier petit coup sur Hadopi qui a été voté à l'Assemblée Nationale la semaine dernière par 16 députés.

Visualiser le résultat du vote.

Bravo aux 10 députés moutonniers (ou abrutis) de la Majorité Présidentielle qui se sont déplacés pour voter pour.

Bravo aux 2 députés du nous-veaux centre qui se sont déplacés pour s'abstenir.

Bravo aux 4 députés de l'opposition qui ont pris le temps de venir voter contre.


Quand on pense qu'il aurait suffit d'une petite dizaine de députés PS ou PC en plus pour foutre le souk une semaine de plus...

Vive le courage politique.
Qu'on ne vienne pas me reprocher après ça d'appeler à l'abstention totale et au téléchargement intensif jusqu'en 2012.